Archives de catégorie : Enquête de confinement

Oser la vulnérabilité

OSER LA VULNÉRABILITÉ
Témoignage de confinement / 8
par Alexandra, de base 6 en tête-à-tête

A l’heure où le confinement n’est encore qu’une éventualité, je fais preuve d’anticipation raisonnable. J’achète quelques biens nécessaires au bon fonctionnement de la maison pour une longue période mais également de la peinture en vue de travaux décoration d’intérieure, des livres, des achats secondaires au cas où…

La peur d’un virus inconnu est présente. Ma crainte se porte moins sur le fait de l’attraper que sur l’éventualité de contaminer des personnes plus fragiles. Le confinement est imposé. Me retrouver isolée physiquement dans la maison avec mari et enfants est une situation plutôt confortable pour mon profil 6 qui considère son foyer comme un havre de paix et se sent en sécurité entouré des siens. Le respect des règles légitimes et œuvrant pour le bien commun: facile! Respecter celles qui manquent, à mon avis, de cohérence et qui sont prises dans l’urgence: moins facile!

Début du confinement, mon centre mental est très occupé à collecter des informations (mon sous-type tête-à-tête a rendez-vous tous les soirs avec le JT), à scruter les incohérences dans la gestion de l’épidémie, à observer le manque de bons sens dans les décisions prises par les autorités. Je suis à la recherche de clarté et de certitude. J’observe que le gouvernement navigue à vue, ce qui ne me rassure pas sur la suite des événements. Flottements dans les actions à mener et discours ambigus sont loin de satisfaire mon esprit toujours en alerte. Je réfléchis à l‘évolution de la société, aux répercussions sanitaires, économiques et politiques, au monde d’après: les prises de consciences porteront-elles du fruit? J’ai du mal à m’abandonner à la Providence et à baisser la garde.

Arrive le temps de la Semaine Sainte, les yeux rivés sur le Christ, je coupe les sources d’informations et me recentre dans la prière. Alors, une certaine tranquillité d’âme s’empare de moi. Une confiance m’envahit, j’éprouve une solidité intérieure. Je suis vivante et ancrée dans l’ici et maintenant. La réactivité de mon profil est moindre; je prends le temps d’apaiser mon mental, de contempler la nature qui s’éveille sous mes yeux, de profiter des moments familiaux empreints de joie et d’amour.

Mon sous-type est à l’œuvre: longs moments d’échanges, de rire et de contemplation avec mon époux. Temps passé à écouter et discuter avec chaque enfant, prendre en compte leurs besoins en fonction de leur tempérament. A ma mesure, j’apporte ma pierre à l’édifice du bien commun en confectionnant des blouses pour les équipes médicales. Le dépassement de soi des personnes qui sont en première ligne, la solidarité et l’entraide révélés par la crise sanitaire m’enchantent et m’apaisent.

Une aile 7 permet de me connecter aux plaisirs de la vie confinée et à l’ébullition d’une multitude de projets après confinement. Une aile 5 apporte prise de recul et approfondissement de sujets psychologiques, philosophiques et théologiques qui m’intéressent. Une flèche en 9 permet de m’inscrire dans un temps long, de contempler la nature, de m’émerveiller des petites choses. J’ai la sensation de faire partie d’un grand tout, d’être reliée à l’humanité qui vit une épidémie à échelle mondiale. J’accepte cette situation exceptionnelle en me disant qu’elle s’inscrit dans le cours des choses. Une flèche en 3 me ramène au centre cœur. Par deux fois, une vague de tristesse profonde et intense semblable à une lame de fond m’envahit. En temps normal, je suis en lien avec les autres essentiellement en pensée: je ne suis pas adepte de coups de fil multiples et variés. Le lien étant coupé par la contrainte de l’isolement, alors le besoin de me relier aux autres se fait sentir, j’ai besoin de voir amis et famille, leur visage en visio et d’entendre leur voix.

Prise de conscience par rapport à mon profil 6: Je me révèle dans l’adversité et les difficultés. Alors me revient la parole de Saint Paul aux Corinthiens : « Quand je suis faible, c’est alors que je suis fort ». Je suis un soutien indéfectible pour les miens en temps difficile. Je suis la vigie sur le pont du bateau dans la tempête qui permet de garder le cap. Mon centre mental bien utilisé permet d’organiser et de gérer la vie de famille afin d’essayer que tout se passe sans heurt. Il me permet également de réinventer le quotidien, de faire preuve de créativité, d’humour, de joie et de légèreté dans des circonstances insolites. Mon esprit est toujours en éveil, de nombreuses questions se bousculent encore et toujours dans mon esprit. Je sais que les Et si… ne sont jamais bien loin. Alors j’accepte les incertitudes et l’inconnu des lendemains. J’ai foi en l’avenir, en la capacité de l’homme à rebondir après les difficultés et à se transcender. Et si cette foi et cette confiance permettaient au profil 6 d’accéder au courage d’affronter les épreuves? Je prends conscience que la vie est un don et je rends grâce à Dieu pour ce don merveilleux!

Même pas mal ?

MÊME PAS MAL ?
Témoignage de confinement / 7
Par Christian, de base 5 en tête-à-tête

Je savais bien que l’incertitude régnait dans ce monde et qu’il n’était finalement qu’un patchwork de terra incognita d’où pouvaient surgir à tout moment des phénomènes qui augmentent dangereusement votre dépendance.

Dépendre immédiatement de ce que font les autres, de ce qu’il savent et que vous ne savez pas, voilà une situation délicate pour une personne de base cinq. Observer que même des médecins ont pu, dans les premiers temps de la crise que nous vivons, présenter des croyances comme des vérités, il n’en faut pas plus pour vous mettre en tension.

Alors vite, se mettre à la recherche d’une information suffisamment factuelle et froide, voilà une piste utile pour éviter une intrusion qui peut vous mettre en pièces. Car, quand on y songe (et on y songe beaucoup), quoi de plus intrusif qu’un virus imperceptible par nos sens qui agit à votre insu et qui se nourrit de votre intimité?

Alors le confinement devient une solution facilement acceptée quand on n’est pas sans repères dans cette forme de détachement. Ce temps entre parenthèses m’a permis, par exemple, d’écrire à mes petits enfants pour qu’ils puissent lire plus tard un témoignage de leur grand-père sur la crise sanitaire en cours. D’usage plus immédiat, j’ai également écrit pour eux un petit conte illustré qui met en scène un méchant microbe minuscule et tout noir. Un peu de connaissance pour la route.

Le monde continue à s’activer et de très belle manière. On ne perçoit aucun renoncement, bien au contraire. J’y participe à distance. Quelle nourrissante émotion! Et puis, il faut bien l’avouer, être en tête-à-tête avec la femme de sa vie, quelle aubaine!

Je cite pour finir le poète Jean-Pierre Siméon qui commentait récemment le chemin de croix: « La pire des ruines: quand la ruine est en nous et que la lumière est impossible ».

 

La conjugaison du présent

LA CONJUGAISON DU PRÉSENT
Témoignage de confinement / 6
par Catherine, de base 8

Si je tenais un journal pour cet étrange moment, je crois que c’est le titre que je lui aurais donné. Voici plus d’un mois que nous sommes assignés à résidence… Une chose est sûre, j’ai très vite assimilé le fait, de la même manière que j’ai encaissé les quelques coups que la vie m’a déjà donnés. Résilience doit être mon deuxième prénom!

J’ai vite réalisé que mon rapport au temps s’était comme condensé: les journées passent à la fois très vite et très lentement, mais je les prends toutes comme elles viennent, sans revenir sur hier, sans penser à demain.

Le rythme s’est imposé de lui-même; se lever tôt pour être la première à la boulangerie, puis aller marcher dans la campagne , seule ou avec mon mari. Tôt parce qu’on y croise personne (non par souci d’hygiène ou peur du postillon, mais je l’avoue pour ne pas faire comme tout le monde…), et tôt parce que le matin est un festival sensoriel; l’odeur des aubépines mouillées, le chant des oiseaux, la rosée du matin qui trempe les chaussures…

Puis la journée est par alternance soit très active; il faut nettoyer, balayer, astiquer (après tout je suis flamande!) mais la frustration est forte; je ne peux pas faire autant de bruit que d’habitude. Parce que oui, c’est vrai je caricature un peu mais j’adore le bruit de l’aspirateur sur fond de musique poussée au maximum! Et je ne sais pas pourquoi mais mari et enfants préfèrent le silence pour travailler au calme… Soit très active donc (le travail que je fais en télétravail est vite et bien fait ); soit… merveilleusement paresseuse. Mon moment de la journée préféré est celui où je vais m’asseoir sur la terrasse et laisser le soleil me réchauffer, ne pas penser, ne pas réfléchir, juste… être là.

J’essaye de ne pas trop être branchée à l’information, parce que je l’avoue , la colère monte vite. C’est vrai que c’est difficile pour moi qui n’en ai jamais fait qu’à ma tête, de me soumettre à ces autorisations, à ce régime contraignant , parfois ça m’étouffe presque… Mais quand je lis ici ou là par exemple, la relation des abus de quelques représentants de l’ordre, la rage monte et le drapeau noir de l’anarchie n’est pas loin!

Spirituellement, je découvre, sans surprise que décidément je ne suis pas mystique. Plus que la prière, ce qui résume ce en quoi je crois c’est la formule: aime ton prochain, ce n’est pas très facile quand on est enfermé chez soi se dit-on… Et puis finalement, cela peut être sourire à la boulangère grognon, laisser passer une vieille personne devant soi au supermarché, prendre le temps d’appeler ou d’envoyer des SMS à ses amis, appeler les dames de la maison de retraite que je vais d’habitude visiter, faire envoyer des fleurs à nos mamans… Et puis prendre soin de mes enfants, de mon mari, essayer de dompter mon dragon intérieur pour qu’ils ne reçoivent pas une flammèche trop vite partie, faire de la maison un endroit agréable…

Je n’accomplirai aucun exploit pendant cette drôle de guerre, je reste une simple mère de famille, mais ce que je fais c’est moi, libre et indépendante qui le décide et ça ça ne changera pas !

du faire à l’être

DU FAIRE A L’ETRE
Témoignage de confinement / 5
par Barbara, de base 3 en tête-à-tête

Le confinement ne représente pas pour moi un arrêt brutal de l’activité mais plutôt la confirmation d’un ralentissement entamé depuis quelques mois déjà et l’approfondissement d’une prise de conscience, un changement profond de paradigme.

Au début du confinement, c’est mon sous-type tête à tête qui a été le plus fortement impacté. Les conversations et entretiens en face-à-face ont toujours eu à mes yeux, une grande importance. Je suis coach et thérapeute, et pour moi, la co-construction se fait dans la présence que seule, et c’est ce que je croyais jusque- là, la relation en face à face pouvait assurer. Bien sûr, de base 3, avec son goût pour les défis, les objectifs, je m’étais à plusieurs reprises prêtée au coaching en ligne ou à la formation à distance, mais toujours avec une espèce de dédain et la conviction que cela enlevait une grande partie de l’efficacité.

Puis est arrivé le confinement, et j’ai dû, bon-gré mal-gré, si je voulais poursuivre mon activité, proposer la thérapie à distance. Quelques-uns de mes clients ont accepté, et oh surprise, j’ai découvert que je pouvais là aussi créer une vraie présence, une vraie relation et à quel point cela pouvait être efficace. Pour ma base 3 tête-à-tête cela s’est avéré très positif.

Tout-à-coup, et cela aussi a été une bonne surprise, je pouvais passer plus de temps avec mon époux. De base 3 comme moi, il a tendance à travailler beaucoup, à se déplacer souvent, bref, à être en mouvement. Avec le confinement, plus de déplacements, du télétravail, et davantage d’activités en commun, promenades, travaux de jardin et surtout plus de moments de répit, de conversations longues, profondes, essentielles, de bons repas partagés. Un ralentissement, une intériorisation qui fait du bien.

Au début du confinement, fidèle à ma base 3, il fallait que je trouve des choses à faire, que je me pose des défis. Animer des conférences, m’inscrire dans un groupe de coachs qui allait travailler sur des formations en ligne, être volontaire sur une plateforme de thérapeutes bénévoles pour écouter les personnes qui ne vont pas bien. Aucun de ces projets ne s’est fait comme je le pensais. Au début je n’ai pas compris pourquoi, cela a généré de la frustration, une comparaison malsaine avec les autres où moi, forcément, j’étais en échec.

Aujourd’hui je comprends pourquoi cela ne s’est pas fait. Le confinement m’a mise en face de cette dualité être/faire qui a été, pendant une grande partie de ma vie, ma ligne directrice. Le confinement m’a invitée à ne rien faire, ou à en faire moins, à avoir une autre relation au temps, à être. Difficile au début, parce que je l’ai vécu comme de la procrastination, de la paresse (peut-être ma flèche en 9?), avec son lot de critique intérieure. Puis, petit à petit, j’ai commencé à me laisser vivre, à me laisser guider par mes sensations, je suis restée de longs moments à contempler la nature qui s’éveillait, les bourgeons qui se formaient, les abeilles qui butinaient et à écouter les oiseaux qui inondaient l’espace de leurs chants mélodieux. Je me suis assise, j’ai médité, j’ai fait du yoga en pleine présence, et j’ai trouvé cela si agréable. Aucune pression, aucun besoin de faire mes preuves, d’atteindre un objectif, pas besoin de plaire ou d’impressionner, juste être là. Et, comme dans un flux, naturel, juste, à mon niveau, je me suis mise à disposition des personnes qui avaient besoin de moi pour les écouter et les soutenir inconditionnellement.

Je ne fais pas vraiment de plan pour le futur, car quand j’anticipe trop, ma flèche en 6 me fait voir tous les risques, tout ce qui pourrait mal se passer. Alors, je préfère méditer sur la peur pour l’apprivoiser et être capable de faire des plans raisonnables, ne pas retomber dans un excès d’activité pour combler, ou au contraire dans une paralysie bloquante.

Cette période de confinement m’apprend à faire confiance en ce qui est là, en ce qui émerge dans l’instant, à me faire confiance et à faire confiance dans le fait que les choses vont se mettre en place naturellement dans une action juste, sans forcer ni batailler.

Tribulations

TRIBULATIONS
Témoignage de confinement / 4
par Pascal, de base 6 en survie

Peur sur la ville, peur sur le pays, peur pour le monde, la pandémie de COVID 19 telle que je le perçois est à la fois un grand chamboultout et une espérance relative compte-tenu de la nature humaine.

De base 6, je devrais angoisser, stresser, douter; un peu comme un lapin pris dans les phares d’une voiture… ce n’est pas totalement le cas: je me dis que je m’en sors plutôt bien, vivant dans le quartier calme et résidentiel de La Clairière à Rambouillet, entouré de verdure, avec un espace clos et avec ma chatte Lana, petit rayon de soleil qui vient d’avoir cinq ans aujourd’hui (même jour que la reine d’Angleterre).

Par contre, je sens la frustration (ce n’est rien eu égard à la situation de milliers de gens malades, aux soignants, aux isolés et ceux qui sont en détresse économique) d’être privé de liberté (je respecte les règles). Etre livré à l’imprévu, à l’impondérable, c’est difficilement tenable, moi qui aime bien planifier, organiser, prévoir, anticiper: vacances, voyages, sorties, stages – j’espère que nous aurons le M4 et M5 cette année! Cela me fait penser à l’apôtre Jacques qui dit dans son épître qu’il y a dans le cœur de l’homme beaucoup de projets mais que seuls s’accomplissent ceux qui sont permis par l’Éternel.

De sous-type survie, je n’ai eu pas eu l’idée ou l’envie de stocker (riz, pâtes, etc) mais par contre, je suis plus inquiet (stressé) à l’idée de choper le virus et sur les perspectives à venir lorsqu’il faudra repartir au boulot: masques, tests… qu’en sera-t-il après le 11 mai… on entend beaucoup de choses et son contraire et cela me perturbe: je n’aime décidément pas le flou.

De centre mental, je ne m’ennuie pas avec moi-même: mon aile 5 est fortement développée, au point que j’ai douté lors du M1 être de base 5. Mais après bien des stages, des lectures et surtout en actionnant mon observateur intérieur, je suis convaincu que mes fixations sont le doute et la peur. Une personne de base 6 qui doute d’être 5 , cela a du sens! Je m’adonne à la lecture de la Bible – primordial, et il faudra aussi bientôt finir la licence de Théologie, approfondir mon anglais et lire beaucoup…  Je planifie, je structure mes journées pour avoir des activités variées: aile 7 peu développée mais qui me pousse aux jeux de mots et à la gourmandise.

Moi qui ai du mal avec mon corps (les exercices Vittoz sont peu aisés) et le confinement n’étant pas bon pour la balance; ma flèche 9 me donne de continuer le vélo d’intérieur, le rameur (à défaut de trop pouvoir sortir à l’extérieur, même avec un ausweis), la relaxation, la cohérence cardiaque et la ronron-thérapie (merci le chat). J’ai bien avancé les articles de bio ennéagramme pour le site de Valérie, mais ma flèche 9 me pousse à prendre le temps (je suis un peu diesel parfois). Moi qui suis un solitaire , j’apprécie les coups de fil quand ils ne sont pas intempestifs, et les moyens de web technologies tels que skype, zoom, Whatsapp qui nous permettent de rester en contact avec les chrétiens de l’Eglise: on se salue de loin mais on se voit.

Cette période est une occasion de s’interroger sur le sens de la vie, sur sa relation à Dieu. Il m’est possible de suivre des conférences et des prédications, des tables-rondes autour de pasteurs, de théologiens, de philosophes… le thème étant: Que fait un Dieu bon dans un monde en crise?

Je ne suis pas optimiste quant au devenir de ce monde… Il y a déjà deux mille ans Pierre écrivait « La fin de toute chose est proche. » 1P, 4, 7. Un pasteur en Israël me disait il y a peu: « Nous sommes à H-2 avant le grand retour ». Les clignotants pour le retour de christ sont au vert: nous vivons sans doute une période formidable, à condition d’avoir fait la paix avec Dieu, en ayant reconnu Jésus comme notre Sauveur et Seigneur personnel.

Je voudrais terminer sur deux éléments plus légers! Ma flèche 3 est peu utilisée sauf quand avec mon épouse qui est aussi à la maison, nous jouons à des jeux de société (Scrabble, IchtusTrivial pursuit chrétien ou yamsje n’aime pas perdre, même si j’ai fait d’énormes progrès et je bénis Dieu de m’avoir donné Catherine qui est de base 9 et beaucoup plus positive que moi: je dois travailler le contentement de soi et c’est dur…

Un dernier mot – verset d’encouragement,  en cette période troublée : « Nous savons en outre que Dieu fait concourir toutes choses au bien de ceux qui l’aiment, de ceux qui ont été appelés, conformément au plan divin. » Épître de Paul aux Romains, 8, 28

Aïe aïe aïe & youpi !

AÏE AÏE AÏE ET YOUPI à la fois, aurais-je du temps?
Témoignage de confinement / 3
par Maguelonne de base 9 en survie

Durant les trois premières semaines du confinement, mon sous-type survie, a pris le dessus… au point d’étouffer les caractéristiques de ma base 9. Je me suis retrouvée mère de famille, comme au bon vieux temps, lorsque j’avais mes trois enfants à la maison… pas évident après sept années sans.

Tous ne sont pas venus s’installer chez nous, deux sur trois. Mes réflexes d’antan m’ont éclaté au visage! Nourrir ma famille, que personne ne souffre du manque. J’étais, en ce temps là, organisée en conséquence, dans une routine rassurante.

Et me voilà partie en croisade, cherchant tous les bons plans pour acheter ce dont nous avions besoin, selon mes critères (et ce ne sont pas ceux des miens qui sont plutôt cools), pour que chacun.e puisse continuer son travail, sans avoir à se préoccuper du quotidien… C’était mission impossible! Serait-ce l’exigence et le perfectionnisme de mon aile 1?

C’était pulsionnel, compulsif, occupant mon esprit jour et nuit… Mon corps en tension, et en même temps je faisais ce que je savais bien faire, ouvrir un supermarché chez moi et surtout gérer pour ne pas connaître de rupture de stock!!! Ah! Ah! Ah! Mission là aussi impossible! Les stocks cela descend toujours.

Je me voyais comme sur un écran de cinéma, cette représentation de moi projetée juste devant moi. Je me suis prise en flagrant délit de nombreuses fois… sans pouvoir intervenir pour m’apaiser, me pauser… moi qui en ai tellement besoin, pour prendre le temps, prendre mon temps… Car après tout je sentais bien qu’au fond de moi, c’était une occasion d’expérimenter un autre rythme, dans ma maison, dans une routine qui me va.

Par contre me retrouver en confinement chez moi, dans des conditions privilégiées puisque nous avons de la place pour que chacun.e ait son espace, avec un jardin qui s’épanouit chaque jour durant ce printemps si particulier… j’aime çà ! Observer les bourgeons qui éclosent sur les arbres, les uns après les autres, à l’unisson pour certaines variétés comme le liquidambar et les différentes essences de bouleaux; attendre que le hêtre pleureur qui est toujours le dernier, s’y mette enfin… Accueillir comme un cadeau les tableaux offerts par Dame Nature sous les rayons du soleil…

J’ai rêvé de commencer ma journée en m’étirant, en prenant le temps de faire une méditation et une cohérence cardiaque, puis écrire sur les sujets sur lesquels j’aimais aimé avoir du temps… puis tranquillement préparer un repas, m’alanguir dans une chaise longue, en plein soleil si généreux en ce moment… et regarder le bal des oiseaux, écouter les chants si particuliers de chacun… Mais là encore mission impossible pour moi! Les besoins de ma famille sont bien plus précieux que les miens…

Je vois que je ne sais pas, en moment de crise, entendre mes besoins. Et pourtant des signes commencent à apparaître… une grande fatigue, une lassitude, mon corps qui me fait mal de partout… la fibromyalgie dormante, se réveillant petit à petit… la tristesse m’envahissant… me sentir seule face à tout çà.

Et je marche dans notre jardin. Je croise mon mari ou un de mes enfants, qui viennent prendre un temps de respiration au milieu de leurs journées hyper denses pour deux d’entre eux… leur sourire et en même temps sentir leurs préoccupations, la densité qu’ils ont à vivre… Je me sens alors comme une éponge qui absorbe tout… cherchant ce que je peux faire pour les soulager… et c’est dur pour moi.

J’oscille d’une émotion à l’autre comme dans un punching ball. Je me sens crispée, parfois abattue, fragile et forte à la fois, agitée et calme tout au fond de moi, sur la défensive à l’extérieur et en sécurité chez moi… Je me laisse traverser, ce n’est pas trop désagréable… je m’en étonne.

Maintenant que ce confinement s’installe dans le temps, j’ai trouvé comment nourrir les miens sans que cela soit trop lourd pour moi… Les actions justes ont été posées. J’accepte que chacun.e prenne sa part, à sa mesure… je ne porte plus toute seule.

Je souhaite m’offrir les semaines qui viennent comme un temps bien mérité car en bon petit soldat j’ai, me semble-t-il, bien organisé le quotidien de la maison… Et là aussi je sens que c’est juste pour moi.

Je me sens plus paisible aujourd’hui, contactant cette paix que je sais toujours présente au fond de moi. Je mange sainement, et mon corps m’en remercie. Je sais comment nourrir ma vie spirituelle. Lorsque mon Jiminy Cricket viens taper sur l’épaule pour m’appeler à nourrir les besoins des autres… je lui souris et lui réponds qu’ils sont assez grands pour les nourrir eux-mêmes. Il est temps de nourrir mes besoins. Méditation, écriture, prière, marche dans le jardin, rêvasser, regarder le temps s’écouler… celui là j’adoooore! Je suis en contact avec moi et je sais qu’alors il émane de moi une certaine paix et que c’est ce que j’ai à apporter au monde.

Le lien social est pour moi simple à entretenir, les technologies actuelles nous permettent tant de choses… un thé festif avec trois amies pour fêter les cinquante ans de l’une d’elle, un apéro dînatoire avec mon mari et quatre couples de Moscou, Paris et Toulouse… un tête-à-tête avec différentes amies… Avoir très régulièrement ma fille aînée, rire avec mes trois petits-fils, m’émerveiller du dernier de quatre mois.

Et puis il a le rendez-vous tous les soirs à 20h pour applaudir tous ceux qui travaillent pour sauver nos vies, pour permettre que le quotidien soit vivable, je pense aux caissières de supermarché, aux éboueurs, aux livreurs, aux facteurs/factrices… et j’en oublie ! Temps de gratitude, de reconnaissance.

Et il y a le temps de soutien d’une voisine seule et en pleine dépression, d’une amie chère qui vient de perdre sa maman, m’associer par la prière le jour de l’enterrement, appeler tous les deux jours ma mère seule chez elle, veiller à ce que tout soit organisé pour qu’elle ne manque de rien… Prendre des grandes respirations… Continuer.

Actuellement je ne me sens pas en manque de liens. J’ai plutôt besoin de ne pas multiplier les rendez-vous… A un moment donné, c’était trop pour moi. Exercice de la vie, j’ai su parfois dire ce qui était possible pour moi, et ce qui ne l’était pas… Je continue à apprendre à dire de vrais Oui ou de vrais Non. Mon corps sait, à moi de l’écouter.

En fait c’est ma vie qui s’installe dans un rythme, je finis par m’y retrouver. Comme chez moi, l’ennui connais pas, j’ai confiance en mes capacités à traverser ce temps de confinement et à savoir vivre l’après… Après tout n’est-ce pas cela la vie?

 

Taillé pour la crise

TAILLÉ POUR LA CRISE
Témoignage de confinement / 2
par Nathan, de base 3 en tête-à-tête

Covid-19, le Président clame l’état de guerre. Une guerre avec des généraux incompétents comme au début de 14-18, voilà ce que m’a donné l’impression de cette drôle de guerre, avec une défaite annoncée. Dur pour ma base 3. Pas de logistique, pas de ressources, et un corps de bataille déjà exténué. Je le sais, je travaille dans un hôpital.

L’aubaine? Les premiers quinze jours. L’occasion de déployer toute l’énergie d’une équipe et d’assister à la transformation des équipes de chercheurs, de médecins spécialisés dans d’autres domaines que la virologie pour parer à l’urgence. La joie de tout réorganiser. Une fatigue écrasante aussi. L’élaboration de nouvelles initiatives dès les premiers jours – et bien avant qu’on en parle – pour les personnes dans les EHPAD, dont nous savions qu’elles seraient exposées singulièrement.

Le piège du surmenage est alors prêt à se refermer. Mais là, je le savais, étant un peu habitué par ma base à l’excitation (presque frénétique) que dope ce type de situation.

J’ai vu de belles choses qui m’ont aidé à prendre du recul sur la gloire, ce fameux « soleil des morts » dont parle Balzac. J’ai vu des médecins et infirmières se délasser, pratiquer le tai-shi pour se détendre. Je me suis arrêté pour les admirer après la nuit infernale vécue. Je pouvais me joindre à eux. J’ai refusé gentiment. Timidité? Non, je voulais admirer en silence les mouvements déliés, une sorte de communion fraternelle entre les membres des équipes qui s’unissaient dans une chorégraphie éblouissante dans le clair matin des jardins de la Pitié-Salpêtrière. C’était retrouver, pour moi, cette joie enfantine du regard qui découvre, admire et contemple la nature comme si c’était le premier matin du monde.

J’ai eu la faiblesse de ne pas m’arrêter assez longtemps, d’autres urgences me réclamaient. Toujours des urgences. Et je sais les résoudre avec une équipe formidable qui n’a pas compté son temps, ses heures, ses week-ends. Avec toujours ce risque de s’épuiser, d’être à bout de souffle, de dompter par sa volonté tenace le corps malgré des yeux boursouflés de fatigue. Pour une fois, peut-être plus que davantage, j’ai écouté mes proches qui me disaient de souffler, de me reposer. Atterrissage dans le corps étonnant.  Dormir mais garder un rythme exigeant. Dormir peu mais dormir tous les jours.

Lâcher prise aux angoisses et se dire qu’on ne pourra pas tout faire, être partout, que les forces sont comptées, les moyens contraints et que la créativité elle aussi à ses propres limites…

La relation entre mon type 3 et mon sous-type one-to-one, se trouve-t-elle affectée? Oui et non. Je continue à voir du monde, à travailler. Jamais autant travaillé d’ailleurs. Mais il y a cette distance que l’on observe. Un mètre ce n’est pas grand-chose mais c’est si loin de ceux avec qui j’ai besoin de mes shoots les yeux dans les yeux. J’en éprouve de la gêne et aucune conférence zoom, facetime ne remplace l’être, la complicité, le moment de qualité passé à table. Bien sûr, j’éprouve ces moments en famille, amis au travail, je suis finalement coincé. C’est frustrant. Et même si l’efficacité reprend le dessus, je sens sourdre une nostalgie du monde d’avant, celui de la poignée de main. Toujours cette nostalgie d’un lointain Paradis perdu? J’ai du mal à creuser, peut-être de peur de rencontrer des émotions trop fortes. La mélancolie est le poison de l’action. Mais toutes les émotions ne sont pas de la mélancolie. N’y a-t-il pas une forme d’inanité à contempler le creux, la béance? Bref, beaucoup de questions que je m’attache à disséquer les unes après les autres en essayant d’être le plus juste possible, sans me mentir à moi-même.

En famille, en couple par contre, c’est la joie d’avoir paradoxalement de meilleurs moments, de poser davantage les choses, de se ressourcer davantage. Je voudrais croire que pour l’ensemble de notre société, il y aura un avant et un après et que finalement, une forme d’ordre naturel reprendra le dessus. Et de cela, je doute.

Je voudrais croire pour moi, que mon travail sera le support de ma vie de famille et non pas l’inverse. Finalement, j’appelle cette réalisation de soi de tous mes vœux sans vraiment en discerner le chemin. A cet égard, j’aimerais un confinement plus long, pour me laisser assez de temps pour me transformer de l’intérieur. Parce que le confinement – même quand on travaille – reste un moment exceptionnel, étrange. Le temps s’est ralentit. Et j’aime ça malgré tout. Il y a cette tension permanente – plus prégnante – entre l’action et les moments pour souffler.

Et la vie spirituelle là-dedans? Plus profonde. Plus inquiète aussi. Plus dense. Plus visitée par des inspirations que je ne sais pas avoir de moi-même. Tôt levé, je peux admirer le lever du soleil et prendre du temps au calme, commencer doucement mon chapelet, suivre des yeux le jour naissant, ce printemps magnifique et simplement rendre grâce. Et surtout, surtout me taire et écouter Celui qui est le Maître de toute vie.

Je ne sais pas encore si j’ai pu mettre en place des choses nouvelles dans ma vie. C’est difficile à dire. Il faudrait plus de recul sur l’événement et un retour à une vie normale. Mais cette vie existera-t-elle? Après le Covid-19, d’autres combats, notamment celui de l’économie nous attendent. J’ai plutôt l’impression qu’après un premier choc, il faudra resserrer la jugulaire de son casque pour d’autres batailles. Cette crise fractionne et unit à la fois. De ces deux forces, laquelle sera la plus forte dans le temps? Ma ressource ici est de croire que l’on peut tout surmonter ensemble. Mais il faut s’assurer de la fiabilité des personnes (j’active ma flèche 6), les sonder. C’est un peu la pesée des âmes. Il faut négocier aussi, en permanence, se montrer à la fois ferme et compatissant (un peu de 9, mais pas trop quand même!)

Voilà ce que je puis dire de cette période étrange où l’on réalise des choses étonnantes avec une équipe soudée. Et où l’on prend aussi plus le temps de discuter ensemble paradoxalement, d’aller plus au fond des choses. Quelque chose de plus authentique, de plus vrai se dessine. Et je goûte une écoute nouvelle avec mes proches comme avec mes collaborateurs. Si nous n’avons gagné que cela, j’estime que c’est déjà un beau cadeau de cette crise, au-delà de la souffrance.

Alors, je sais que nous allons continuer à nous organiser, à rationaliser, à inventer. Mais ce qui est beau, et je prends le temps de m’arrêter pour le regarder, c’est que les femmes et les hommes ne sont pas les moyens de cette grande aventure collective, mais des personnes extraordinaires dans leurs doutes et dans leur action déterminée. Certains soirs, une grande tendresse pénètre mon âme pour ceux avec qui je vis au travail comme en famille, parce que j’éprouve enfin le sentiment plénier d’appartenir à une grande et si belle famille humaine.Si capable. Si généreuse.

Une époque formidable

UNE EPOQUE FORMIDABLE
Témoignage de confinement / 1
par François, de base 7 en social

Le confinement pour moi est un mélange étrange d’atmosphère joyeuse et anxiogène.

Il est certain que le vivre en famille complète et dans une maison avec jardin n’est pas la même chose que si
j’avais été seul dans un petit appartement parisien. Cela aide à un bilan largement positif.

Toujours est-il que la famille étant réunie et composée de personnalités riches et toniques, ce temps de confinement ressemble à un apéro géant où, le soir venu, je jette un défi à la tristesse, à
l’angoisse et au fantôme de la mort. J’ai assuré mes arrières, ne risque pas de manquer. Le moment convivial est encore plus important que d’habitude et ne saurait faire défaut, au risque de tomber dans une morosité inquiétante. Car la face sombre du tableau existe bien: sans doute, plus encore qu’à l’accoutumée, les insomnies sont au rendez-vous, les rêves tournent au cauchemar et se sont assez substantiellement modifiés. Il s’agit d’une angoisse de mort, aiguisée par cette fameuse peur de souffrir si commune aux personnes de base 7 et qui, dans les circonstances actuelles, prend la forme d’une menace précise. Face à cela, le recours aux plaisirs est encore la réponse la plus adéquate.

Pendant la journée, je m’adonne au travail intellectuel qui est pour moi un plaisir intense. Mon activité professionnelle me permet cela. Dans mon bureau, situé dans l’annexe de la maison, entouré de mes livres, baigné toute la journée par la musique classique ou pop, selon l’humeur et l’envie, j’avance comme jamais sur ma thèse. Seul, l’esprit mobilisé, je jubile de trouvailles en découvertes. Ma flèche 5 est activée en permanence. Je suis capable d’éplucher des textes avec minutie, je ne rate aucune note en bas de page. Le projet commence à prendre forme, c’est jubilatoire.

En revanche, la flèche 1 que je n’ai jamais beaucoup activée demeure toujours sous-utilisée. Je
pense avoir compris que le passage en centre corps m’est très difficile, bien plus que dans le centre cœur au demeurant, et que même en temps de crise nécessité ne fait pas loi.

En fin de journée, quelques parties de ping-pong m’aident à déconnecter de mon mental (il est amusant de constater que quand je pense au coup d’avant, je perds systématiquement le point). Et la réunion familiale le soir autour de quelques verres permet d’assurer la dose d’échanges nécessaires.

Le social que je suis met évidemment sur le tapis les sujets politiques du moment, ou plutôt de l’après. Toujours dans l’anticipation de ce qui va arriver. Cette période est passionnante car notre monde est à reconstruire. Le bouillonnement intellectuel m’électrise. Je lis l’économiste jésuite Gaël Giraud, je suis à fond sur Facebook. Le soir, j’ai entrepris de relire tout Julien Green. M’ennuyer moi ?

La frustration est cependant réelle de ne pas pouvoir sortir de notre cadre agréable. La forêt est interdite d’accès alors qu’elle est en face. Outre le plaisir que cela m’ôte, c’est aussi une belle
occasion d’être dans mon corps, par la marche consciente vittozienne, qui s’envole. J’ai néanmoins décidé d’appliquer scrupuleusement les règles, du fait sans doute de mon aile 6 et de mon sous-type social prêt à sacrifier ses plaisirs pour le bien du groupe.

Heureusement, le marché a réouvert, et je vais en ville deux fois par semaine. J’éprouve un plaisir intense à échanger avec la pharmacienne, la fromagère, le caviste ou le libraire qui organise un drive. Parler à ces personnes extérieures au cadre familial est vital: tout en étant comblé par la présence de ma famille réunie, la vie ne saurait s’arrêter au cercle de la survie. J’appelle mes meilleurs amis alors que je n’aime pas vraiment le téléphone. Je suis les Facebook live de notre maire, et surtout je rate le moins possible des concerts à la maison que donnent les song-writters pop que j’aime sur Facebook. Tout un monde artistique est en train de se réinventer: j’ai l’impression de participer à une aventure incroyable, d’appartenir à une
communauté d’amateurs éclairés et je me dis que cette époque est, vraiment, malgré tout
formidable…