Louis de Funès et la base 6

191385LOUIS DE FUNES
Un archétype* de base 6

Louis de Funès a enchanté des générations de Français. Avec le recul, même s’il n’a pas tourné que des chefs d’œuvre impérissables (encore que Rabbi Jacob ou Hibernatus tiennent vraiment la route), son talent à faire rire en fait un des plus grands acteurs comiques du XXe siècle.

Traditionnellement, l’ennéagramme associe d’ailleurs l’humour au centre mental, c’est-à-dire aux types 5, 6 et 7. Ce qui ne veut pas dire que les autres en sont dépourvus, mais que chez eux, la rapidité du mental, la précision du verbe et le goût du contrepied sont autant d’ingrédients propices aux ressorts comiques. De ce point de vue, Louis de Funès est archétypal.

Les biographes de Louis de Funès ont largement mis en valeur certains traits caractéristiques du type 6 tournant autour de la peur. Angoisse dévorante de ne pas réussir à faire vivre sa famille qui va l’amener à une quête inlassable de perfectionnisme, non pour être parfait comme un 1, mais pour être sûr de ne pas être abandonné par le système cinématographique. Funès fut un bourreau de travail par peur d’être un jour laissé sans ressources. Un sous-type survie est assez probable comme le montre cet autre exemple : ayant hérité de sa femme d’un magnifique château doté de plus de cent fenêtres, il équipa chacune d’un système de sécurité !

Peur donc, préoccupation de sécurité, mais qui peut se conjuguer à un vrai courage porté par un sens aigu de la loyauté. Un de nos stagiaires, son voisin à l’époque, nous a livré cette anecdote : voisin de la famille du colonel Erulin, le héros de Kolwezi, Louis de Funès grâce à ce « sixième sens » souvent attribué aux personnes de type 6, surprit des cambrioleurs à l’œuvre dans la maison inoccupée, intervint pour les mettre en fuite, prenant un mauvais coup au passage. Vigilance, sens ultra développé du danger, alternance de phases phobiques et contre-phobiques : nous sommes en plein dans la problématique du type 6.

A l’écran, Louis de Funès joue admirablement de la version pleutre du 6. A titre d’exemple, la scène de la première rencontre avec sœur Clotilde dans Le Gendarme est éclairante. Le 6 survie, pour assurer sa protection, est extrêmement chaleureux : il tisse des alliances qui le sécurisent jusqu’à pouvoir paraître obséquieux et soumis. Et la conduite intrépide de la religieuse le met en panique : la tête lâche alors et Louis de Funès, mort de trouille, la salue en la quittant d’un inoubliable « Au revoir Monsieur l’abbé »!

Cette variante phobique du 6 est la plus présente dans ces films même si, parfois, la variante contrephobique affleure ou même éclate comme dans cette scène célèbre de La Grande Vadrouille où Louis de Funès en chef d’orchestre pourrait faire penser à un 8 dominant…

http://youtu.be/l30ONNO50So

… Trois chapitres du Grand Restaurant ne laissent pourtant pas de doute à la différenciation 6/8 qui pose parfois quelques questions existentielles à nos stagiaires…

A ce sujet, autre point très central pour la base 6, celui du rapport à l’autorité. Capable d’être d’une loyauté sans faille, pour le meilleur, le 6 peut aussi alterner entre une soumission excessive et une défiance agressive. On peut voir dans cet entretien combien Louis de Funès était foncièrement rebelle à l’autorité, même s’il s’y plia en courbant l’échine durant les années de vache maigre :

Humour qui pique, humour qui touche, humour comme forme d’intelligence à part entière, on ne se lasse pas des scènes mille fois revues de Louis de Funès ni de l’humour de nos amis de base 6. Ceux-là se surprennent d’ailleurs souvent à rire d’eux-mêmes car le rire reste la meilleure des défenses et permet de garder ce jardin secret si jalousement gardé par eux.

* L’archétype est un représentant connu et supposé d’un type de l’ennéagramme, l’hypothèse reposant sur des éléments caractéristiques de sa vie ou de son oeuvre. 

Libres…

imgresLA LIBERTE INTERIEURE
Jacques Philippe
Editions des Béatitudes

Jacques Philippe est  prêtre depuis 1985, membre de la communauté des Béatitudes, infatigable conférencier, et auteur de quelques grands classiques de spiritualité, profondément enracinés dans la grande tradition spirituelle chrétienne. Mais tous ses livres témoignent aussi d’une très fine connaissance de la psyché de nos contemporains. La Liberté intérieure est son livre le plus célèbre et c’est celui que je recommande en stage à qui veut creuser les rapports entre connaissance de soi et vie spirituelle.

imgresTrois grands angles. Tout d’abord celui de la liberté, qui nous est cher, à nous modernes. Nous n’aimons pas être entravés dans notre liberté et ce n’est pas illégitime. Mais il y a une autre manière de concevoir la liberté, celle que nous pouvons garder dans les circonstances les plus incapacitantes, les plus douloureuses, et qui garde intactes en nous nos capacités de choix et de joie. Cette liberté intérieure, par rapport à nous-même, nos proches, notre environnement, le monde, personne ne peut nous la ravir, car elle trouve sa source en Dieu.

Deuxième angle, qui est comme le mode d’emploi du premier : celui de l’instant présent. Jacques Philippe nous dit que l’on ne peut rien pour notre passé: il est derrière nous. Avec un peu de malice, il relève que bien que nous essayons de prévoir et de contrôler notre avenir, il nous échappe et nous déroute toujours. Il nous reste l’instant présent, le seul que nous pouvons vivre tel qu’il est, et qui nous permet de rencontrer Celui qui est toujours présent à nous-mêmes, alors que nous sommes nous-même si souvent absent à ce qui est ici et maintenant.

Troisième angle, la vertu. Nous avons appris, à juste titre, que la vie spirituelle consistait à laisser grandir en nous les trois vertus théologales de foi, d’espérance et de charité. Mais nous risquons de croire que nous pouvons maîtriser notre croissance dans la liberté intérieure. Or, comme le dit saint Paul, c’est dans notre faiblesse, notre fragilité, nos échecs, nos écueils, que nous rencontrons la force de Dieu qui est notre rocher, comme dit le psaume, et son amour inconditionnel pour nous.

Reconnaissance de qui nous sommes, accueil de l’instant présent, liberté intérieure : tel est précisément le chemin que propose l’Ennéagramme. Jacques Philippe consacre une page, la 146, à la description d’une démarche jumelle à cette méthode de connaissance de soi dont nos stagiaires disent souvent qu’elle est libératrice. Découvrir nos motivations inconscientes, prendre conscience de ce qui nous meut, permet de ne plus subir le monde et nous-mêmes, de ne plus vivre en mode automatique, de devenir acteurs de nos vies. La méthode Vittoz en est un allié précieux car là où l’Ennéagramme propose une cartographie de notre vie intérieure, la méthode Vittoz nous apprend, par le retour à l’instant présent via les cinq sens, à nous accueillir nous-mêmes tels que nous sommes. Le but ultime étant de découvrir notre talent, ce don de Dieu déposé en nous, pour le faire servir au monde. Car c’est en devenant ce que nous sommes que nous sommes le plus libres.

Métaphore de la base 1

Paris - mai 2014

LA NEIGE

par Géraud, de base 1

C’est l’hiver. Le ciel et la terre sont sales. Tout m’apparaît en désordre : ces feuilles éparses, ces branches nues et tordues, ce vent qui siffle, ces fumées de cheminée qui s’agitent comme des folles… Moi, la neige, je dois corriger ces teintes tristes, répandre le silence, geler les mouvements : je serai intraitable, je tomberai dru jusqu’à ce que tout soit recouvert de mon épais manteau blanc !

Je lâche donc avec une régularité de métronome mes flocons silencieux en bataillons disciplinés, toujours plus nombreux et lourds, afin de tout remettre en ordre, atténuer les caprices des courbes du terrain et ensevelir toute saillie un peu trop orgueilleuse. Je veux que tout soit parfait : toute trace sur l’immaculée surface est rapidement recouverte, avec une sorte de mépris têtu qui exaspère. Je suis si tenace que bientôt, plus rien ne bouge, c’est le grand silence blanc de la neige. Gare à celui qui viendrait troubler l’ordre ainsi établi : il m’irrite tant que je suis capable de le recouvrir d’une avalanche furieuse !house-covered-with-snow-in-the-mountains-in-the-forest_1600x900

Lorsque je laisse éclater ma colère trop longtemps maîtrisée dans une tempête cinglante et inattendue, le vent me saisit et m’emmène là où je ne veux pas aller : alors, quand tout retombe, c’est le chaos, tout est à recommencer. Au contraire, lorsque je me laisse conduire par le vent serein, quelle élégance dans les courbes et les ondes blanches que je dépose ! Mais cette tension de toutes mes ressources pour maintenir cette virginité recréée m’a épuisée. Et je ne suis pas satisfaite : cette perfection manque de vie…

Alors, je frappe doucement au carreau des chaumières, d’où émane la chaleur du foyer : là, je suscite le plaisir d’être ensemble, autour de l’âtre rougeoyant et d’un bon repas. On se rencontre, on se confie et on s’entraide. Il faut dire qu’ils ont le temps : sous la neige toute vie est ralentie. J’invite à la contemplation, à l’harmonie et aux discussions feutrées et douces.

Généralement, j’ai plutôt peur du soleil : il détruit mon travail et surtout, il met la pleine lumière sur les imperfections qui subsistent. Mais je vois aussi que lorsqu’il paraît, je suis toute étincelante et pare les collines d’une belle robe d’argent. Les joues sont roses, on a envie de courir les sommets, d’emplir ses poumons d’air frais et de se rouler sur mon matelas moelleux ! Je fonds d’émotion… Et si je me laisse surprendre par la légère chaleur du printemps, je m’étourdis à force d’humer les effluves de la terre, d’admirer les couleurs de la vie et d’écouter le bourdonnement des abeilles…

Au fait, l’abeille ferait aussi une belle métaphore de la base 1, non ?

Du rire et des larmes

le-prenom-affiche-4f67102b326b6LE PRÉNOM
Un film de Matthieu Delaporte et Alexandre de la Patellière, 2012

Le succès du film Le Prénom est sans doute dû à la remarquable étude de caractères qui en fait la force. On ne jaugera pas ici des qualités cinématographiques de ce qui relève du genre du théâtre filmé si cher au cinéma français, avec toutes les limites que cela comporte, sauf à relever tout de même la très belle performance du quatuor d’acteurs principaux. Ce qui me paraît avéré est la stupéfiante cohérence des personnages, beaucoup moins caricaturaux qu’une lecture superficielle pourrait le laisser entendre. Cohérence qui peut s’analyser de façon convaincante avec l’ennéagramme.

3327124-7Commençons avec le personnage de  Vincent, superbement campé par Patrick Bruel, qui donne l’impulsion de l’histoire en annonçant à un dîner où il est invité par sa sœur et son beau-frère qu’il va appeler son fils Adolphe. Nous pourrions être en face d’un archétype de base 3, agent immobilier fier de montrer sa réussite, qui roule en grosse berline allemande et apporte une bouteille de Cheval-Blanc 1985. Bien trop occupé pour penser à autre chose qu’à son travail et à l’image qu’il donne, il ne sait à peu près rien de celui de sa compagne. Mais il y a plus que ces traits parfois un peu trop caricaturaux du 3. Il y a cette capacité à s’engager à corps perdu dans une joute verbale avec son beau-frère, joute où la question de la vérité n’a aucune importance, mais dont il faut être vainqueur. Et c’est là où Vincent bascule, empêtré dans un mensonge dont il ne sait plus sortir car cela l’amènerait à reconnaître une défaite, un échec. Pour gagner un challenge dérisoire, il met de côté toute émotion, peut paraître cynique ; mais quand il croit être trompé par sa femme – ce qui constitue l’échec du lien par excellence si redouté en base 3 – il ne sait pas prendre le recul nécessaire et se laisse submerger par sa propre émotion. Comme l’apprend l’ennéagramme, le 3 est un émotionnel qui s’ignore, et le personnage incarné par Bruel le montre à merveille.

3327124-9Prenons les autres personnages dans l’ordre de rentrée en lice dans ce jeu de massacre comique et tragique. Pierre, le beau-frère, joué à la perfection par Charles Berling est le prototype du bobo intello de gauche, très certain de son appareil mental. On n’a pas de mal à reconnaître une base 5, par ce côté intello en retrait, comme détaché de la vraie vie, aimant à parler avec des références plus qu’à se mettre lui-même en danger. Le défaut que lui renvoie son entourage, et dont il est parfaitement dupe, est celui de l’avarice qui n’est pas seulement une difficulté à dépenser son argent, mais surtout à donner de lui-même, à dépenser une énergie assez faible : on voit Charles Berling, épuisé par la joute, quasiment disparaître en deuxième partie de film. Vraisemblablement, l’impact émotionnel (dont il n’a pas conscience) de la question politique, l’importance de son rôle de professeur d’université, une manière d’avoir soin à sa manière sobre et signifiante de son image, évoqueraient un sous-type social.

3327124-11Claude, l’ami d’enfance de Vincent et de sa sœur, joué par Guillaume de Tonquédec, pourrait être un bel archétype de base 9. C’est ce que lui renvoient avec cruauté ses comparses : difficulté à se positionner, incapacité à entrer en conflit, un côté qui peut aller jusqu’à une certaine transparence. Même lorsque ses amis l’étiquettent à tort, et avec une consternante légèreté comme homosexuel, il ne se met pas en colère.  Mais ces facettes sombres sont l’envers d’une étonnante qualité d’empathie et d’écoute, d’une propension à la paix et à l’harmonie étonnante. Or cet homme qui par souci d’éviter un conflit a caché un lourd secret à ses amis durant des années, va du coup être à l’origine de l’explosion finale, faute d’avoir à temps affronté le problème. On en dira pas plus, mais il paraît probable que cet homme aimanté par une femme de façon tout à fait singulière, soit en sous-type tête-à-tête.

3327124-3Elisabeth, sœur de Vincent et femme de Pierre, est un personnage dont il n’est pas si facile de chercher la base car son rôle de mère de famille débordée et peu reconnue pour ce qu’elle fait vient parasiter l’analyse. On pourrait la voir en 2 à certains aspects, mais elle n’en n’a ni le côté  structurellement envahissant, ni la part conjoncturellement agressive. Il se pourrait qu’elle soit de base 4 dans une version assez sobre, comme le sont une bonne partie des personnes de base 4, contrairement à ce que disent les livres. Valérie Benguigui incarne une femme de cœur, dont le ressort profond est émotionnel (comme on le voit pour son travail de professeur de français), qui se sent profondément incomprise et qui peut parfois manquer de logique. C’est surtout dans la seconde partie du film, et notamment à la fin, que se dévoile une femme qui souffre de manque de lien avec un mari en retrait et un frère autocentré, et surtout qui vit très mal le manque d’authenticité de celui qui avait le statut de son meilleur ami, confident de cœur. Se révèle alors le rejet du 4 de tout ce qui est superficiel, notamment des rapports avec sa belle-sœur, mais aussi une présence émotionnelle qui désarçonne les protagonistes. Lorsqu’elle s’adresse à chacun apparaît aussi un sous-type tête-à-tête  pour lequel la rivalité (avec son frère ou sa belle-sœur) est très présente, avec à sa manière une indéniable séduction.

3327124-8Finissons avec Anna, femme de Vincent qui arrive un peu tard dans la soirée et dont le rôle est moins important, incarné par Judith El Zein. Celle que son mari appelle « la bombe » pourrait bien être de base 6, avec une violence verbale très ajustée, mais très destructrice au fur et à mesure que l’action se tend. Loyale avec la famille de son mari dans le choix du prénom de l’enfant, elle se sent trahie dans sa fidélité lors du quiproquo et se défend en attaquant. Le personnage gagne de l’épaisseur quand est dévoilé le lien qui la lie à Claude et à Françoise, la mère de Vincent et Elisabeth. Une problématique complexe apparaît autour de la confiance et de la trahison, avec un mélange d’humour et d’agressivité, de volonté d’apaisement et de saillies imprévisibles. Un sous-type tête-à-tête en 6 dit force et beauté est assez plausible.

Reste Françoise, que l’on ne fait qu’entendre ou plutôt deviner au téléphone et voir dans un flash-back éloquent. Intrusive, ultra-présente, on pourrait évoquer du 8 ou du 2, mais les éléments d’analyse sont trop minces pour se risquer aux hypothèses. En revanche un sous-type tête-à-tête n’est pas improbable pour cette étonnante séductrice !

Au cinéma comme dans la vie, le rire peut être un joli mécanisme de défense mais aussi un moyen de mise à distance qui permet l’approfondissement : ainsi la comédie peut révéler le fond de l’être parfois mieux qu’une tragédie. Voir ou revoir ce film à la lumière des caractères de l’ennéagramme donne de nouvelles raisons de rire mais surtout nous fait aimer davantage les personnages parce que l’on s’approche un peu plus ainsi de leurs ressorts profonds.

La base 7 en chanson

imgresFRIDAY ON MY MIND by The Easybeats : une chanson archétypale de la base 7

par François

« Je me sens mal lundi, mais je le chante avec le sourire. Viendra le mardi, je vais mieux… C’est sûr que le reste de la semaine va trop lentement, mais je n’ai que vendredi en tête! Et là, ce sera fun, j’irai en ville avec ma copine qui est vraiment jolie. Et cette nuit, j’en perdrai la tête! »

Telles sont à peu près les paroles un peu faciles et électriques mais si sympathiques de ce tube de 1966, Friday on my mind, commis par le groupe australien The Easybeats. Tout cela est écrit au présent, mais un présent absolument habité par l’anticipation du futur. Un futur qui ne peut être que meilleur que le présent! Telle est l’obsession de la base 7 : se garantir un futur aimable, amusant, surprenant, afin de s’évader d’un présent dont il craint qu’il ne soit trop morne, ennuyeux, pénible, voire (mais c’est déjà le début de la conscience) douloureux…

Ce morceau est devenu un classique du rock, du fait notamment de son magnifique riff de guitare, tendu et explosif! Avec sa mélodie énergique et joyeuse, ses harmonies simples et insouciantes. Un morceau qui évoque le paradis des côtes australiennes, l’innocence des amours de jeunesse, mais qui porte en lui une tension qui fait toute la sauvagerie voire la violence du morceau : tension qui renvoie à un malaise, celui du refus de ce lundi détesté, ce quotidien triste et fade qu’il veut à toute force oublier. Telle est la problématique de la base 7: se projeter dans un futur rayonnant, pour s’évader d’un aujourd’hui qui a ses faces d’ombre.

Mais à force de jouer cette partition, le 7 risque de n’être jamais présent, même aux bons moments. Le sourire permanent aux lèvres de Stevie Right, le chanteur, même lorsqu’il évoque des choses pénibles, est archétypal. L’excitation du groupe également: « Tonight I loose my head ». En tant que mental, le 7 a un cerveau qui fonctionne en permanence, sans lui laisser de répit. Sa stratégie pour le lâcher est de s’engouffrer dans le plaisir, la fête, l’euphorie, et tâcher de s’en libérer pour vivre une sorte d’ivresse dont il sort épuisé et vide.

Un challenge en base 7? Mettre ce talent de la joie et de la légèreté au service du monde en vivant l’instant présent tel qu’il est, heureux ou douloureux : le chemin de toute une vie… En attendant, goûtez la part de 7 qui est en vous et profitez de ce chef d’œuvre pop pour monter le son de vos enceintes!

 

Quand les neurosciences confirment

 

David Daniels

David Daniels

Neurobiologie, dynamique relationnelle et Ennéagramme : LES TROIS CENTRES D’INTELLIGENCE

Traduit par le CEE avec permission du site drdaviddaniels.com

David Daniels, Professeur en médecine, a longtemps dirigé le département sciences comportementales de l’université de Stanford. Il est également  co-fondateur de la Tradition Orale de l’Ennéagramme et auteur du best-seller Trouvez rapidement son profil Ennéagramme… et savoir qu’en faire. Il a également enseigné l’Ennéagramme à l’Université de Stanford, aux Etats-Unis et à l’international pendant plus de vingt ans.

Comment nos relations –et donc nos vies- sont-elles reliées à notre neurobiologie ? 

L’envie d’écrire cet article provient des énormes travaux de recherche accomplis depuis plusieurs années et qui donnent une crédibilité nouvelle à l’Ennéagramme. En effet, la science commence à reconnaître que l’homme, comme tous les mammifères, partage trois centres d’intelligence. Centres à partir desquels nous faisons l’expérience, percevons et discernons ce qui se passe dans le champ à tout moment. Nous avons été tellement habitués à penser que notre intelligence résidait seulement dans notre cerveau, cette matière grise située au-dessus de nos épaules, que c’est déjà une surprise d’apprendre qu’il y a en fait trois endroits à partir desquels nous pouvons ressentir et évaluer le monde extérieur.

Depuis le départ, le système de l’ennéagramme a évoqué ces trois centres d’intelligence ou trois champs d’expérience. Je suis toujours stupéfait qu’un tel savoir était connu depuis longtemps, bien avant que les microscopes, les scanners et autres progrès technologiques du siècle dernier aient pu, de leur côté, prouver que ces trois centres étaient une réalité. Le système de l’ennéagramme, en effet, est subdivisé en trois parties, chacune étant en correspondance directe avec ce qui est maintenant considéré comme les trois centres d’intelligence des humains/mammifères. Les trois centres se présentent comme suit :
. le centre de la tête, également appelé centre mental ou centre de la pensée
. le centre du cœur, également appelé centre émotionnel
. le centre corporel, également appelé centre physique ou centre moteur

Le système de l’ennéagramme est donc validé par ce que ces trois centres démontrent quant à tous les comportements des mammifères. Les neurosciences montrent, en effet, que tous les mammifères ont trois réactions aversives lorsque leurs trois besoins fondamentaux ne sont pas comblés :
La détresse ou la panique survient lorsque nous faisons l’expérience d’une perte ou d’une connexion vitale avec les autres. La détresse est reliée au centre d’intelligence du cœur, qui concerne ce qui touche au lien et à l’amour. Dans la théorie de l’attachement, l’expérience que fait l’enfant d’une connexion saine crée un lien sécurisé et pose les fondations d’une vie émotionnelle et psychologique saine.
La peur ou la terreur survient lorsque nous faisons l’expérience d’une menace, d’un danger, d’une insécurité ou d’une incertitude. La peur est reliée au centre d’intelligence mental, qui essaye de comprendre ce qui nous rend la vie prévisible et sécurisée. Dans la théorie de l’attachement, un attachement sécurisé permet à l’enfant d’être vu et par-delà sécurisé.
La colère ou la rage survient lorsque nous faisons l’expérience de n’être pas traités correctement ou que nous ne sommes pas pourvus de ce dont nous avons besoin ou désirons. La colère est reliée avec le centre d’intelligence corporelle ou des tripes, qui ressent ce qui ne va pas dans le monde et ce qui n’est pas satisfaisant. Dans la théorie de l’attachement, le lien sécurisé amène l’enfant à faire l’expérience de la protection, dont tous les enfants ont besoin et qui est également relié directement à ce centre.

C’est trois réactions fondamentales sont très puissantes parce qu’elles sont des réactions d’alerte et qu’elles sont douloureuses. Elles sont en relation directement avec le centre de notre être et, par là, au sentiment de plénitude du tout dans l’unité. Aussi, il y a un sentiment de bien-être ultime incrusté dans chacune de ces émotions que nous nous efforçons de ne pas ressentir. La colère essaye d’éviter la rupture avec notre besoin essentiel de bien-être et d’estime de soi, la détresse essaie d’éviter la rupture avec notre besoin d’amour inconditionnel et de connexion vitale, et la peur essaye de nous éviter la rupture avec le savoir de nous priver de ce qui rend la vie prospère et sécurisée.

Alors que chacune de ces réactions est critique à comment nous survivons, nous développons et grandissons, nous ne pouvons pas faire face aux vicissitudes de la vie, si ces réactions sont constamment sous pression. Notre capacité à adapter, ajuster et gérer ces réactions devient partie prenante de notre chemin de développement. Donc, même avec si elles sont par nature aversives, ces réactions existent pour de bonnes raisons et sont fondamentalement « bien intentionnées ». Elles sont immédiatement présentes lorsque nous percevons que les trois besoins fondamentaux de sécurité/certitude, amour/connexion, et valeur/besoins sont menacés ou ne sont pas remplis. La figure ci-dessous montre les trois besoins fondamentaux, les trois réactions aversives correspondant à chacun de ces besoins, et le centre d’intelligence auquel chacune est reliée.

Figure : Les émotions aversives de base et les trois centres d’intelligence

émotions-aversives

Au fil des siècles, la psychologie et l’éducation occidentales ont porté l’intelligence mentale au pinacle et l’ont vénéré comme le centre de l’intelligence. Aujourd’hui, la science démontre sans le moindre doute l’existence des deux autres formes d’intelligence, tout aussi puissantes : l’intelligence du cœur (intelligence des émotions) et l’intelligence du corps (intelligence des sensations et du mouvement). L’ennéagramme prend en compte ces trois centres, reconnaît que chacun d’eux existe en nous, et que chacun d’eux peut être entraîné. Si nous sommes en connexion avec chacun des ces centres, chaque type de l’ennéagramme s’appuie plus fortement sur l’un d’entre eux.

La capacité à reconnaître et à évaluer lequel de ces trois centres vous privilégiez le plus souvent est un merveilleux premier pas vers une meilleure conscience de soi. Alors, reconnaître, valoriser, et intégrer ces trois centres en tant que «forces également compétentes» est crucial pour tendre vers une vie équilibrée et développer des relations harmonieuses. Il est essentiel de parvenir à équilibrer ces trois forces à l’intérieur de nous, afin de pouvoir ensuite les mettre en œuvre dans nos relations.

LE CENTRE-TÊTE DOMINANT : types 5, 6, 7
Si le centre -tête est dominant, je tends à filtrer le monde à travers mes facultés mentales.
– Les buts de cette stratégie sont de minimiser la peur, anticiper les possibles situations douloureuses et maximiser la certitude en utilisant les processus mentaux que sont l’analyse, la vision et la planification. Si nous pouvons décoder le monde extérieur, comprendre et anticiper ses sollicitations, alors, nous gagnons en sécurité et en évaluation des risques.
– Cela demande d’anticiper le futur, à la fois positivement et en envisageant les manifestations potentiellement dangereuses, afin de développer des stratégies ad hoc avant le possible événement.
– Tous les types dépendent de l’intelligence mentale pour développer les qualités supérieures du centre mental comme la prévenance, le discernement, et la sagesse.
– Mots clé : sécurité, certitude, protection, assurance, prévisibilité, pensée.
– Lorsque nous ne nous sentons pas à l’aise dans ces mots clé, nous réagissons par la peur/terreur, comme tous les mammifères, avec des variations de peur chez les humains parmi lesquels l’anxiété, le souci, le doute et l’appréhension.

Le CENTRE-CŒUR DOMINANT : types 2, 3, 4
Si le centre cœur est dominant, je tends à ressentir le monde via le filtre de l’intelligence émotionnelle.
– Je suis sensible et je m’ajuste à l’humeur et à l’état émotionnel des autres, afin de combler mes propres besoins d’être accepté, d’être en lien, de recevoir de l’affection et d’être reconnu. Plus que les autres profils de l’ennéagramme, je suis dépendant de la reconnaissance et de l’admiration des autres. J’en ai besoin pour établir une bonne estime de moi-même et créer une identité que je perçois comme aimable. L’idée, c’est de m’assurer que je vais combler mon besoin d’amour et de lien.
– Pour m’assurer de recevoir approbation et reconnaissance, je tends à me créer une image qui va amener les autres à me valoriser, à m’accepter et à me considérer comme spécial. Par ailleurs, le pouvoir de ce centre est amplifié par l’émotion positive du prendre soin de, ce bon sentiment qui émerge des liens que nous ressentons dans une relation. Cette émotion est partagée par tous les mammifères. La relation mère-enfant illustre cette histoire de lien. Toute notre vie, nous avons besoin de ressentir un tel sentiment.
– Tous les profils Ennéagramme s’appuient sur leur intelligence émotionnelle pour ressentir et développer les qualités supérieures du centre du cœur, comme l’empathie, l’écoute de l’autre, la compassion, la gentillesse.
– Mots clé : amour, connexion, affection, lien, sentiment et reconnaissance.
– Lorsque nous ne nous sentons pas à l’aise dans ces mots clé, nous réagissons par la détresse/panique, comme tous les mammifères, avec des variations de détresse chez l’homme parmi lesquelles la tristesse, la mélancolie et la honte.

Le Centre Corps dominant : Types 8, 9, 1
Si le centre corps est dominant, je tends à filtrer le monde par mon intelligence kinesthésique: le mouvement dans l’espace, les sensations physiques et une connaissance sensorielle.
– Je vais utiliser ma situation et mon pouvoir pour rendre la vie conforme à ce que je veux qu’elle soit, obtenir ce que je veux et sortir du champ ce qui m’empêche d’obtenir ce que je veux. Je vais tendre vers des stratégies qui assurent ma place dans le monde, obtenir ce que je veux, et maximiser mon confort.
– Tous les profils dépendent de l’intelligence corporelle pour développer les qualités supérieures de ce centre : évaluer intérieurement l’énergie requise pour l’action, discerner quelle puissance utiliser pour accomplir cette action le plus justement possible, et développer la sensation « d’être ancré », d’exister là, dans le monde.
– Dans l’enfance, sans distinguer clairement la plupart des situations, nous sommes naturellement ancrés dans le moment présent. Toute notre vie, c’est notre centre corporel qui nous ramène dans le moment présent, ce que nous pouvons faire consciemment en nous recentrant sur nos sensations. Lorsque nous sommes vraiment ancrés (quand nous savons exactement qui et où nous sommes dans le temps et dans l’espace), nous ressentons les frontières de notre individualité dans le monde, nous nous sentons « incarnés » et, à partir de là, nous pouvons avancer dans notre vie, et nous relier sainement aux autres.
– Mots clé : puissance, valeur, respect, protection, confort, entreprendre l’action, harmoniser, appartenance.
– Lorsque nous ne nous sentons pas à l’aise dans ces mots clé, nous réagissons par la colère/rage, comme tous les mammifères, avec des variations chez l’Homme parmi lesquelles l’irritation, le ressentiment et l’impatience.

Ce qu’en écrit Thérèse d’Avila

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CONNAISSANCE DE SOI ET VIE INTERIEURE
Thérèse d’Avila
Le Château intérieur

Dans ses « Demeures », la grande Thérèse nous enseigne que pour accéder à la septième et dernière demeure intérieure, fine pointe de l’âme et temple du Saint-Esprit, il faut passer par les six autres, dont les deux premières sont celles de la connaissance de soi, peuplées de chausse-trappes et d’animaux étranges…

« Revenons donc à notre château aux nombreuses demeures. Vous […] devez […] fixer votre regard au centre ; là se situe la salle, le palais, où réside le roi ; considérez le palmiste : avant qu’on atteigne sa partie comestible, plusieurs écorces entourent tout ce qu’il contient de savoureux.

Ici, de même, de nombreuses salles sont autour de celle-là, et également au-dessus. Les choses de l’âme doivent toujours se considérer dans la plénitude, l’ampleur et la grandeur, on ne le dira jamais assez, elle est capable de beaucoup plus que ce que nous sommes capables de considérer, et le soleil qui est dans ce palais se communique à toutes ses parties. Il est très important que toute âme qui s’adonne à l’oraison, peu ou prou, ne soit ni traquée, ni opprimée. […]

Oh ! s’il s’agit de la connaissance de soi ! Car elle est si nécessaire, (cherchez à me comprendre), même pour celles d’entre vous que le Seigneur a introduites dans la demeure où il se trouve Lui-même, que jamais, malgré votre élévation, vous ne pouvez mieux faire, et vous ne le pourriez pas, même si vous le vouliez ; car l‘humilité travaille toujours à la façon dont l’abeille fait le miel dans la ruche, sinon tout est perdu ; mais considérons que l’abeille ne manque pas de sortir pour rapporter des fleurs ; ainsi fait l’âme, par la connaissance de soi ; […] Cherchez à mieux progresser dans l’humilité ; et, ce me semble, jamais nous n’arriverons à nous connaître si nous ne cherchons pas à connaître Dieu […]. »

Métaphore de la base 5

imagesUNE PAIRE DE GOOGLE GLASS

par Julien, de base 5

Je suis une paire de Google Glass photosensibles.

Quand je vous vois, il y a tant d’informations qui m’arrivent que je suis incapable de retenir votre prénom.

C’est aussi que je suis un peu perdu derrière ces verres qui foncent sous votre regard.

07113282-photo-google-glass-montureLe récent guide des bonnes pratiques éditées par Google m’a déprimé. Il faudrait que je renonce à l’attitude Glasshole (s’isoler du monde) pour au contraire « partager mes découvertes avec la communauté » et « interagir avec le monde environnant tout en répondant aux questions des plus curieux avec civilité ».

Ils ne voudraient pas en plus que je me fasse naturiste?

Non vraiment ils ne comprennent rien. Mais je suis sûr qu’ils n’y croient pas eux-mêmes.

Car comment pourrait-on perdre son temps en des discussions futiles alors que les Glass permettent d’approfondir tant d’aspect du monde et des êtres, sans s’exposer le moins du monde.

Lors d’un module des panels, un homme plein de délicatesse m’a demandé comment il fallait nous dire bonjour, à nous les cinq. J’ai bien réfléchi et j’en suis venu à la conclusion qu’il suffisait de dire « bonjour Google Glass ! ».

Car pour celui qui se cache derrière, il faudra revenir…

Julien, Bacon-les-Bruyères.

Métaphore de la base 8

EleonorLA CATHEDRALE

par Eléonor, de base 8

Voici quelques semaines, j’ai eu l’occasion de travailler la glaise… Alors que je malaxais la matière, mes deux mains se sont arrêtées, emboîtées l’une dans l’autre comme un danseur de flamenco qui fait ses palmas : les doigts de la main gauche coulés dans la paume de la main droite, cette dernière surplombant la première comme pour la protéger, la cacher. Les deux réunies formaient une ligne serpentine, courbe et fragile, fine et friable. J’y ai vu l’enfant 8 gauche et dissimulé dans le géant 8, droit et inflexible. La part douce, la tendresse, les émotions d’intime et de douleur, le silence du cœur et le vide intérieur, cette quête indicible  de s’accorder du prix et de la valeur, toutes ces choses me sont alors apparues si belles et pourtant si occultées. La main 8 volontariste, la battante, la déferlante, celle qui a de l’aplomb et refuse de se laisser marcher sur les pieds, la généreuse défenseuse des laissés pour compte prenait toute la place, prenant aussi le risque d’étouffer littéralement sa consœur. Quelle étrangeté que ce moment où je me suis reconnue dans la terre que j’avais façonnée.

La Cathédrale de Rodin

La Cathédrale de Rodin

Je ne sais pourquoi mais, presque simultanément, La cathédrale de Rodin m’est apparue. Les deux mains s’y entremêlent, l’une sur l’autre comme réconciliées et unies, ne faisant plus qu’un seul corps. J’ai désiré cette métamorphose de ma statuette qui était née dans la glaise ; j’ai désiré la voir ainsi évoluer et se couler dans le bronze. J’ai désiré donner autant de place et de pouvoir à la tendre gauche qu’à la ferme droite, partager tant l’innocence que la fronderie.

Sur ma table, la glaise avait séché. Alors mes mains nues se sont jointes pour recréer cette cathédrale sculpturale, ma cathédrale vivante. La gauche a regardé la droite dans un air de quasi défi, lui montrant sa force et sa fierté de se reconnaître enfin. Mes deux mains se sont ainsi élevées confiantes, telles un grand enfant et un vieil adulte partis sur le chemin bras dessus bras dessous.  J’espère que cette image s’affirmera en moi, y fera sa demeure et s’y épanouira. J’espère que ces deux parts manquantes, appuyées l’une contre l’autre dans une amitié mutuelle, deviendront plus forte qu’une forteresse imprenable, humbles gardiennes du trésor de chacun et du mien.

De la connexion entre les vertus

Dans nos stages, nous avons à cœur de relier la connaissance de soi à une éthique aristotélicienne des vertus afin que chacun puisse repartir avec un chemin d’évolution propre.

L’ennéagramme en effet permet de découvrir sa passion dominante, cultiver sa vertu propre, et ainsi concourir à l’épanouissement de toutes les vertus du diagramme : une bonne nouvelle s’il en est, déjà évoquée par les Pères du désert en leur temps.

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Jean Cassien mentionne dans ses Conférences (V, 13) que l’ordre dans lequel les passions se présentent et s’engendrent est variable selon les personnes :
« Les huit passions principales font ensemble la guerre au genre humain, mais leurs attaques ne se présentent pas de la même manière chez tous indistinctement. […] Ici c’est l’esprit de luxure qui a le premier rang, là domine la colère. La cénodoxie revendique le sceptre chez celui-ci ; chez celui-là l’orgueil détient la souveraineté. Et bien que chacun de nous ait à subir les assauts de tous, ce n’est pas de la même manière ni selon le même ordre que nous en sommes travaillés. »

sttheophanAprès lui, et à l’instar de Thomas d’Aquin, Théophane le Reclus, dans ses Lettres de direction spirituelle (Editions Syrtes, p. 143-144), parle de cultiver une vertu propre qui entraînerait toutes les autres.

« Il y a en chacun une passion principale autour de laquelle s’enlacent toutes les autres. C’est celle-là qu’il faut vous efforcer avant tout de dénicher. […]

L’ayant détectée, classez les autres par rapport à elle : laquelle est plus près, laquelle est plus loin. Et comprenez comment est structuré votre cœur : c’est une précieuse acquisition! Car, lorsque à la suite de cela vous entreprendrez de vous laver des passions et des mauvais penchants, vous verrez mieux dans quelle direction porter vos efforts : vers votre passion principale.

Lorsque vous l’aurez vaincue, toutes les autres se disperseront d’elles-mêmes. Comme à la guerre : quand le gros des forces de l’ennemi est enfoncé, il ne reste plus qu’à poursuivre le reste des troupes et  à l’abattre. Les actes, c’est facile à corriger. Tu n’as qu’à ne pas faire le mal, et tout est là. Mais transformer le cœur et le corriger n’est pas l’affaire d’un instant, un combat est nécessaire.

Et dans ce combat, quand on ne sait pas où porter les coups, l’on peut s’épuiser, se démener pour rien – et n’arriver à rien. Donc, ajustez vos efforts! »