Archives de catégorie : Vie spirituelle

Qu’est-ce que la conscience ?

QU’EST-CE-QUE LA CONSCIENCE ?

Beaucoup de courants de psychologie contemporaine, mettent la conscience au centre, comme moyen de connaissance de soi, des autres et du monde et comme moyen de progression. Nous aussi. Mais qu’est-ce que la conscience? Une instance subjective inviolable qui n’admet pas de règle extérieure/supérieure? Une conviction intime qui rejoint le réel mais ne peut être confirmée/infirmée de l’extérieur? 

La réponse de saint John-Henry Newman pensée par Benoît XVI me semble – pour utiliser des termes vittoziens – faire la différence entre une conscience emissive (la raison se projette sur l’objet) et une conscience réceptive (la raison reçoit sa forme de l’objet). Ainsi, l’obéissance à la vérité (pour soi, pour la relation à l’autre, pour le monde), ou je préfère dire la volonté de cheminer vers la vérité, emprunte toujours les voies de notre subjectivité, qui se laisse informer. Comme pour l’inspire-expire conscient de la respiration vittozienne, l’alternance subjectivité-objectivité de la conscience est un chemin vers la vérité toute entière, qui demeure un horizon. Autrement dit avec Gustave Thibon dans L’Ignorance étoilée : « L’étoile divine est intérieure et invisible; elle éclaire l’âme du voyageur et non le chemin où il marche; elle nous donne assez de foi pour aller au-delà de tout, mais elle ne dispense de rien.”

Discours du pape Benoît XVI à l’occasion de vœux à la Curie romaine, Salle Royale du 20 décembre 2010:

« En Newman, la force motrice qui le poussait sur le chemin de la conversion était la conscience. Mais qu’entend-on par cela ?

Dans la pensée moderne, la parole conscience signifie qu’en matière de morale et de religion, la dimension subjective, l’individu, constitue l’ultime instance de la décision. Le monde est divisé dans les domaines de l’objectif et du subjectif. A l’objectif appartiennent les choses qui peuvent se calculer et se vérifier par l’expérience. La religion et la morale sont soustraites à ces méthodes et par conséquent sont considérées comme appartenant au domaine du subjectif. Ici, n’existeraient pas, en dernière analyse, des critères objectifs. L’ultime instance qui ici peut décider serait par conséquent seulement le sujet, et avec le mot conscience on exprime justement ceci: dans ce domaine peut seulement décider un chacun, l’individu avec ses intuitions et ses expériences.

La conception que Newman a de la conscience est diamétralement opposée. Pour lui conscience signifie la capacité de vérité de l’homme: la capacité de reconnaître justement dans les domaines décisifs de son existence – religion et morale – une vérité, la vérité. La conscience, la capacité de l’homme de reconnaître la vérité lui impose avec cela, en même temps, le devoir de se mettre en route vers la vérité, de la chercher et de se soumettre à elle là où il la rencontre. La conscience est capacité de vérité et obéissance à l’égard de la vérité, qui se montre à l’homme qui cherche avec le cœur ouvert.

Le chemin des conversions de Newman est un chemin de la conscience – un chemin non de la subjectivité qui s’affirme, mais, justement au contraire, de l’obéissance envers la vérité qui, pas à pas, s’ouvre à lui. »

 

Travailler ou danser ?

TRAVAILLER OU DANSER ? 
par Sophie
de base 1

Toute perfectionniste que je suis, j’avais écrit, immédiatement après le stage, un texte métaphorique: je suis un brouillon. Trois mois plus tard… il n’est toujours pas envoyé évidemment. Parce que je considère tout ce que je fais comme un brouillon, j’ai souvent renoncé à finir mes projets, ne voulant jamais qu’ils soient figés dans une forme imparfaite. Et bien sûr… acte manqué… aujourd’hui, je ne retrouve plus mon texte!

Quand je préparais mon mémoire de recherche, un jour, j’avais plusieurs semaines de retard pour rendre une fiche de lecture analytique. À tel point que la directrice de mémoire se demandait si je savais bien lire et écrire! Ma fiche s’allongeait et se réorganisait sans cesse, je n’y voyais que brouillon à reprendre. L’outil numérique aidant à effacer, couper, coller à l’envi, je ne voyais plus la trace des heures de travail passées à faire et défaire. Je n’aimais pas relire mes brouillons alors souvent je recommençais, repartais d’une nouvelle feuille blanche.

Si bien qu’au bout du compte, je m’enlisais, estimant que le résultat n’était pas à la hauteur d’autant de travail. Et de fait, j’étais tombée dans une spirale vicieuse: je n’y voyais plus clair et mon travail était arrivé à un point de qualité au-delà duquel mes prétendues améliorations n’apportaient aucun nouvel élément substantiel. Il fallait que j’arrête, ne me sentais pourtant toujours pas prête à l’envoi. Je stagnais, découragée, incapable d’y mettre un point final. Jusqu’au jour où une amie chercheuse universitaire m’a dit: « ce que tu appelles brouillon, c’est sans doute ce que l’on attend de toi ». Déclic. Pour l’anecdote, deux ans plus tard, quand j’ai rendu mon mémoire en entier, j’ai choisi une mise en page sobre et sans illustration, même en première page, signifiant ainsi que le travail n’était pas achevé… Je me suis même aperçu après coup qu’il y restait plusieurs coquilles. Paradoxe du perfectionniste qui rend un travail qui pourrait à certains égards sembler bâclé.

Le remède pour soigner mon perfectionnisme aigu? Me forcer à finir tout projet entrepris, quitte à me frustrer en ne commençant pas un projet tant que le désir et la volonté de le finir ne sont pas au rendez-vous. Je sais alors que je dois aussi veiller à ne pas tomber dans la facilité de la procrastination: tout est pensé cent fois, rien n’est commencé concrètement, rien n’est réalisé. Et l’antidote aux maintes idées de dernière minute? M’engager à respecter une échéance pour terminer un projet, dans un temps imparti, et y être fidèle.

Mais encore faut-il aller jusqu’au bout du geste. Reste ensuite à se détacher de l’artefact et à l’offrir au monde pour qu’il fasse sa vie. Ne pas succomber à l’ultime tentation: garder pour soi. J’aime travailler, seuls les moments présents comptent, dès lors, quand un projet fini, je m’en désintéresse. Quelle joie à se détacher d’un projet que l’on n’aura plus l’occasion de retravailler? Il ne me restera plus qu’à le relire, plus rien à faire. Or, j’ai besoin d’agir sur la matière, pas seulement de la contempler.

Par conséquent, lorsque j’envoie un travail fini, ce n’est pas parce que je l’estime terminé puisque j’y vois toujours des modifications possibles à essayer… mais bien parce que le temps fixé est révolu et que j’ai fait preuve d’un courage héroïque (oui :-)) en osant prendre le risque de livrer une part de moi-même si imparfaite soit elle. Si vous lisez ce texte, je m’en félicite, en même temps que je transforme progressivement la douleur de la séparation qui me ronge en soulagement, libérée de mes propres habitudes stériles et répétitives. Oui, entreprendre et mener à bien est une véritable ascèse au quotidien pour moi, tâcher de ne pas dévier: ne pas procrastiner et ne pas non plus produire des quantités astronomiques de brouillons pour assouvir mon besoin vital de créer. Mieux vaut pour un perfectionniste vivre dans une culture de tradition orale! Ou danser?

Est-ce la raison pour laquelle la danse est venue me chercher? Comme tout art vivant, elle contraint le danseur à mobiliser toutes ses ressources au moment de la représentation, pas de brouillon possible, pas de reprise… L’autre avantage de la danse est qu’elle n’est jamais figée, aussitôt un geste terminé, transition et l’on passe au suivant. À la fin de la danse, il ne reste une trace que dans la mémoire des corps, de ceux qui l’ont vécue, de ceux qui l’ont regardée. Il faut danser à nouveau pour que la danse existe, éternellement… Parfois dispose-t-on d’une photo mais il n’y a aucune ambiguïté sur le fait qu’elle n’est qu’un aperçu imparfait de la réalité vivante. Une vidéo? Idem. Donc la perfectionniste que je suis est en paix quand elle danse, car son travail n’est jamais fini.

Comme Ariane tisse inlassablement le même ouvrage, la danseuse aime à reprendre l’ouvrage de son corps qu’elle arrache à sa finitude par l’énergie vitale du travail, devenant lui-même prière, une expérience spirituelle et mystique de l’instant présent. Une éternité. Une grâce extatique.

 

de la responsabilité de la paix

DE LA RESPONSABILITÉ DE LA PAIX

« Notre unique obligation morale, c’est de défricher en nous-mêmes de vastes clairières de paix et de les étendre de proche en proche, jusqu’à ce que cette paix irradie vers les autres.

Et plus il y aura de paix dans les êtres, plus il y en aura aussi dans ce monde en ébullition. »

Etty Hillesum

Kaléidoscope

KALEIDOSCOPE
Par Sœur Louise
De base 3 en tête-à-tête

Je me sens parfois comme un cheval un peu sauvage, qui s’emballe facilement, prêt à se lancer dans une grande aventure, une traversée, avec tous ceux qui sont prêts à s’embarquer, sûr qu’il aura la force nécessaire pour atteindre son but, que rien ne pourra l’arrêter ou les empêcher. Il faudra peut-être parfois un peu ruer ou faire quelques écarts à gauche et à droite, voire même bousculer l’un ou l’autre en passant…

S’arrêter, prendre le temps d’une pause sera toujours difficile… seulement s’il faut! Mais pas trop longtemps! Il faut avancer!

Étonnamment le soir, à l’étage, notre cheval laissera peut-être la place au petit oiseau, une mésange, qui sera heureuse de partager un repas au coin du feu, avec d’autres, connus ou de préférence inconnus, et même peu considérés. Ecouter, chanter, prendre du bon temps ensemble et se rappeler d’où nous venons : tout cela sera très bon.

Régulièrement c’est aussi la petite ermite qui montre le bout de son nez: elle a un besoin farouche de se retrouver face à elle-même et à son Dieu qu’elle aime et dont elle se sait aimée depuis toujours. Maître de ce silence qui la refait, reprendre un contact prolongé avec notre mère Nature, qui l’engendre et l’enseigne, l’accueille toujours les bras grands ouverts, avec ses arbres si solides et uniques, la nourrit par sa pâque permanente, sa vie foisonnante et silencieuse, son chant gracieux et virevoltant, sa danse délicate et enivrante.

Ces différentes facettes, me demanderez-vous peut-être, peuvent-elles être amies et se conjuguer dans la tendresse?  Avec le temps et l’enracinement, la tempérance et le respect, un peu de sagesse, qui ne peut naître que de la brisure dé-couverte, cela peut donner naissance à une belle symphonie! C’est accepter d’être simplement un petit vase d’argile qui se laisse façonner, creuser, vider… et finalement trouver par la divine lumière.

Ou… un gruyère, après en avoir patiemment et douloureusement vidé les trous, qui se rend au Père dont il reçoit son si bon goût. Et finalement, les petits trous, ce n’est pas laid du tout ! La place est de nouveau libre pour recevoir, faire fructifier et rendre grâce: une nouvelle dynamique s’enclenche peu à peu.

La vie qui s’était un moment affaiblie… jusqu’à trembler de peur et frôler la mort et son pouvoir destructeur… la vie peut de nouveau dévaler mais maintenant doucement canalisée, comme un ruisseau qui bondit joyeusement dans son lit, comme une agnelle toute confiante dans le troupeau près de sa mère. Le mouvement des saisons continue, dans une nouveauté qui surprend toujours: c’est la bonté de notre Dieu, qui fait toute chose nouvelle, quand elles sont remises dans ses mains paternelles, par l’enfant caché en nous qui s’éveille… jusqu’au jour du Face-à-face éternel.

Un psaume de fin de stage

19-transformations-de-chenilles-en-papillons-avant-apres-Morpho-peleides-2UN PSAUME DE FIN DE STAGE

« C’est toi qui as créé mes reins, qui m’as tissé dans le sein de ma mère.
Je reconnais devant toi le prodige, l’être étonnant que je suis : * étonnantes sont tes œuvres toute mon âme le sait.

Mes os n’étaient pas cachés pour toi * quand j’étais façonné dans le secret, modelé aux entrailles de la terre.
J’étais encore inachevé, tu me voyais ; * sur ton livre, tous mes jours étaient inscrits, recensés avant qu’un seul ne soit !

Que tes pensées sont pour moi difficiles, Dieu, que leur somme est imposante !
Je les compte : plus nombreuses que le sable ! Je m’éveille : je suis encore avec toi.
Scrute-moi, mon Dieu, tu sauras ma pensée  éprouve-moi, tu connaîtras mon cœur.
Vois si je prends le chemin des idoles, et conduis-moi sur le chemin d’éternité. »

Psaume 138, 13-18, 23-24

Un langage adapté à chacun

imagesUN LANGAGE ADAPTE A CHACUN
Saint Grégoire le Grand

Dans le prologue de sa règle pastorale, Saint Grégoire le Grand souligne l’importance de présenter à chacun un discours qu’il peut entendre, dans la seule vérité.

Cela n’est pas sans faire penser à l’ennéagramme pour lequel chacun a un angle de vue différent sur le monde…

Pour avancer, quand une personne de base 7 devra faire preuve de sobriété, une personne de base 1 devra cultiver une certaine légèreté et apprendre le plaisir… les mêmes choses ne peuvent donc être demandées aux uns et aux autres. Quand une personne de base 8 est directe par nature et doit travailler avec une personne de base 9 dont l’urgence est l’harmonie,  sortir de  son mode de communication ordinaire pour s’adapter à lui peut lever certaines incommunicabilités.

« Une seule et même exhortation ne convient pas à tous, car tous ne sont pas soumis aux mêmes habitudes de vie. Ce qui est utile aux uns nuit souvent aux autres. Les plantes qui nourrissent tels animaux en font périr tels autres. Un sifflement léger calme les chevaux, excite les jeunes chiens. Le remède qui abat telle fièvre accroît les forces de telle autre. Le pain qui fortifie des vies robustes est mortel pour les tout-petits.

Le langage des enseignants doit donc se conformer à la nature de leurs auditeurs, de façon à s’adapter à chacun, pour ses besoins à lui, et cependant ne jamais renoncer à l’art d’édifier une communauté.

Des esprits à l’écoute, attentifs, ne sont-ils pas, si je puis dire, les cordes tenues sur la table de la cithare? Sous peine de rendre le chant dissemblable d’avec lui-même, l’homme qui a l’art de les toucher les frappe de façon dissemblable. Dès lors, elles font entendre une mélodie harmonieuse, car pincées sans doute par un seul plectre, elles ne le sont pas d’une seule et même touche. Ainsi, pour faire grandir tous ses auditeurs dans la vertu de charité, un docteur doit-il toucher leur cœur à l’aide d’un seul fonds de doctrine, mais non d’une seule et même façon d’exhorter. »

Règle pastorale III, Prologue, trad. C. Morel Paris, Cerf coll. « Sources chrétiennes » 382, 1992, p. 259-261

La paix au quotidien

L’ENNEAGRAMME, SOURCE DE PAIX AU QUOTIDIEN
Mathilde de Robien
Aleteia, 24 mai 2018

WOMAN,SAD,CAFE

Outil de connaissance de soi et des autres, l’ennéagramme nous fait prendre conscience de nos vertus et de nos travers. Il peut avoir de vraies répercussions sur la vie quotidienne. Témoignages.

« Enfin je comprenais certains de mes automatismes, certains traits de caractère qui me faisaient culpabiliser, et pourquoi je ne sais pas dire non ! », s’exclame Marine. Cette femme, mariée et mère de cinq enfants, a récemment suivi une formation à l’ennéagramme auprès d’une psychopraticienne, Dominique Lambert. L’ennéaquoi ? L’ennéagramme est un outil de connaissance de soi et de développement personnel mis à jour dès l’Antiquité. Tombé dans l’oubli, cet outil est réapparu au début des années 1900 et rencontre depuis une cinquantaine d’années un succès grandissant. L’ennéagramme dresse une cartographie de la personnalité, distinguant neuf manières de regarder le monde, appelées bases ou types, correspondant à neuf motivations fondamentales.

Un outil pour se connaître soi-même

L’ennéagramme permet de prendre conscience de son trait de caractère principal, caractérisé par une vertu. Valérie Maillot, formatrice de la tradition orale de l’ennéagramme à Fontainebleau, s’attachant à relier cet outil à une anthropologie chrétienne, se félicite qu’à la fin de chaque stage les participants sachent repérer la vertu qui leur est propre. Les objectifs des formations à l’ennéagramme sont triples : se connaître soi-même, en définissant notamment quelle est sa vertu principale, mieux comprendre les autres et mieux vivre ensemble.

Suite à un deuil douloureux, Marine a ressenti le besoin de redécouvrir sa « mission » en tant qu’épouse, mère et photographe professionnelle. C’est pourquoi elle a participé à plusieurs stages d’ennéagramme : « La première formation a pour but de reconnaître son “type“. J’ai lutté pendant deux jours, voulant être type 2, l’altruiste, celui qui est tourné vers l’autre, pour finalement reconnaître, dans des larmes de soulagement et de libération, que j’étais type 3, le battant, tout du moins en apparence. »

Cependant, l’ennéagramme ne se contente pas de coller une étiquette. « Loin de mettre les gens dans des cases, précise Marine, la formatrice nous a présenté cet outil comme une façon de s’ouvrir à soi-même et aux autres. L’effet immédiat de cette découverte a été de me sentir unifiée et en paix.  »

Un atout pour la vie de couple

Outil de connaissance de soi et de l’autre, l’ennéagramme peut se révéler d’une grande aide au sein du couple. Il engage les conjoints à être plus attentifs aux attentes et aux demandes, parfois silencieuses, de l’autre. Valérie Maillot donne l’exemple d’un couple au seuil de la rupture, qui, après le premier jour du stage, ont réalisé que leur discorde prenait racine dans leur différence de rythme. Lui ne supportait pas l’agitation et la pression. Elle ne se sentait vivre que par un agenda surchargé. La simple prise de conscience que l’autre était différent leur a permis de se remettre en question, tout en considérant l’autre avec miséricorde. Résultat, lui a accéléré et elle, a ralenti le rythme.

Pour Valérie Maillot, l’ennéagramme est un outil de compassion. En comprenant les intentions et la logique de l’autre, il est probable que nous serons de moins en moins tentés de le juger ou de le critiquer. Il invite à porter un regard plein de miséricorde.

Un atout pour la vie en entreprise

Les répercussions des formations à l’ennéagramme ne se limitent pas au cadre personnel et familial. Elles sont également bénéfiques en entreprise. Benoît, 44 ans, chef de projet dans le secteur aéroportuaire, ayant effectué quatre formations ces cinq dernières années, témoigne de la confiance que lui a procuré la connaissance de soi, et l’apaisement intérieur qui en a découlé. Prendre conscience que l’autre, et en l’occurrence son patron, ne fonctionnait pas comme lui, lui a permis d’arrêter de se faire des films à scénario catastrophe lorsque ce dernier lui demandait de passer dans son bureau.

En outre, l’ennéagramme est un excellent outil de management dans la mesure où il permet de s’adresser à ses collaborateurs selon la manière la plus adaptée à leur caractère. Tandis que certains ont besoin qu’on leur détaille les tâches à effectuer, d’autres ont besoin de lest afin de faire émerger leur créativité.

Un outil de vérité

S’il est allié avec une vision chrétienne de l’homme, l’ennéagramme, en tant qu’outil de connaissance de soi, peut permettre « d’assouplir ce qui est raide », et de laisser un peu plus de place à la grâce. Mais ce n’est pas un outil de salut, précise Valérie Maillot. Seul Dieu sauve! La remise en question qu’il suppose demande de l’humilité, et le courage d’agir contre la structure et les habitudes de notre personnalité.

Le père Guillaume, après un stage auprès de Valérie Maillot, témoigne que « si l’ennéagramme est utilisé comme un moyen de connaissance de soi, il peut devenir un moyen de connaissance de Dieu. Que je reconnaisse humblement mes carences et parfois mes fêlures ou même mes failles, que je n’hésite pas à les fixer, que je ne cherche pas à m’échapper de ma médiocrité en oubliant qui je suis et que je me laisse à Dieu et à son Esprit. Avec l’ennéagramme, on possède un dessin non seulement de ses qualités mais de ses défauts. Comment changer ? D’abord en acceptant de se regarder tel que l’on est. Sans s’échapper. Sans se chercher des excuses. Sans utiliser l’ennéagramme comme une excuse. Ensuite il faudra faire intervenir l’Esprit saint, il faudra se laisser à cet élan radical qui nous porte hors de nous-mêmes… »

Les 9 types de personnalité

Quel type de personnalité êtes-vous ? Aucun n’est meilleur ni moins bon que l’autre. Chaque type est rattaché à un travers et à une vertu. Voici la définition des 9 types, donnée par Valérie Maillot.

Type 1 : Exigeant vis-à-vis de lui-même et des autres, voyant immédiatement ce qu’il faut faire pour améliorer les choses ; ressent un perpétuel sentiment d’autocritique et un ressentiment qui a du mal à s’exprimer dans une colère contenue.
Type 2 : Devine immédiatement les besoins des autres qu’il aide sans compter avec chaleur et générosité ; cherche l’affection et la reconnaissance de l’autre en ayant du mal à exprimer ses propres besoins.
Type 3 : Est motivé par la réalisation et la réussite et sait relever tous les défis ; s’adapte à l’autre pour se valoriser à ses yeux et pense qu’on l’aime pour ce qu’il fait et non pour ce qu’il est.
Type 4 : Considère que la vie n’a de sens que dans la mesure où elle permet de développer des relations authentiques, belles et intenses. Vit des émotions fortes, souvent mélancoliques et focalise sur ce qui manque à la qualité/l’originalité/la beauté de la relation.
Type 5 : Rationnel, veut comprendre ce qui l’entoure en analysant et accumulant les connaissances ; tendance à s’isoler et à être dans la rétention de soi.
Type 6 : Met son intelligence au service d’une vigilance aiguë face à tous les dangers qu’il repère avec une grande acuité ; cherche la sécurité dans le sentiment d’appartenance et la loyauté.
Type 7 : Enthousiaste, ouvert, rapide et souple, passe d’une idée et d’un univers à l’autre ; obnubilé par la recherche du plaisir et sa planification, a beaucoup de mal à supporter la contrainte et l’enfermement.
Type 8 : Franc, d’un bloc et doué d’une grande capacité d’affirmation qui font de lui un leader ou un protecteur ; veut exercer sa force et son contrôle sur ce(ux) qui l’entoure(nt) en niant sa propre vulnérabilité.
Type 9 : Capable d’apprécier les points de vue des autres et à œuvrer pour l’harmonie ; difficulté à exprimer son point de vue et tendance à multiplier les activités « périphériques » (narcotisation) pour éviter le conflit.

En quête de sens

EN QUÊTE DE SENS
Quatre formateurs à l’Ennéagramme
invités par Sophie Nouaille à Radio Notre-Dame
Le 12 avril 2018

30729187_10214087491434161_1170595999404523520_n

Qu’est-ce que l’Ennéagramme ? Quel est son lien avec la vie chrétienne ? Quels en sont les écueils ? Quelle en est la fécondité ?

Autant de questions auxquelles ont répondu Etienne Séguier et Valérie Maillot, formateurs de la Tradition Orale d’Helen Palmer et David Daniels par Eric Salmon, ainsi que Dorothée Nicolas et Thierry Grandjean représentant l’école de Riso Hudson.

Un vrai beau moment de radio et de partage autour de ce bel outil de connaissance de soi et de miséricorde, pour oser être vulnérable et retrouver des visages de ressuscités.

Retrouver ma liberté

FullSizeRender-04-02-18-12-22RETROUVER MA LIBERTÉ
par Bénédicte

Avant toute chose, je tenais à vous remercier encore, toi et François, pour les deux jours que vous m’avez permis de vivre.

Je suis rentrée hyper bien (tête, cœur, corps!), confiante, sereine et pleine de joie.

Vous m’avez permis de retrouver ma vraie liberté. J’ai encore compris beaucoup de choses sur mes choix, mes erreurs et mes réactions. Je crois même que je me suis pardonnée à moi-même certaines choses.

Et tout çà sans violence, dans l’accueil de ma personnalité dans laquelle j’étais en train de m’enfermer. La reprise a été un peu hard, je dois bien avouer. Et la suite me parait un peu floue même si je sais par quoi commencer… La prière et la confiance me guideront pour la suite…

Mais sans vous, sans votre approche si juste et si respectueuse de notre personne, je n’y serai pas arrivée, pas si vite et pas si calmement.

Et puis ça a été aussi l’occasion de faire de magnifiques rencontres et je suis sûre que je garderai des liens avec certains et certaines…

Alors MERCI…

J’ai hâte de continuer même si je sais que je vais encore creuser et travailler sur mon type d’ici là.

Augustin ou la base 7 en social

moyen-age_chretien_saint_augustin_philosophie_monde_medieval

SAINT AUGUSTIN
Un archétype* de base 7 en social

Nous sommes nombreux à penser que saint Augustin pourrait être un bel archétype de la base 7. On connaît sa vie: jeune homme brillant, il fréquente les rhéteurs et mène une vie dissolue, au désespoir de sa mère, sainte Monique. Et puis, après un détour par le manichéisme, ce fut la rencontre avec saint Ambroise et la conversion qui va le mener à l’épiscopat d’Hippone en Afrique du Nord, et à produire une des œuvres les plus magistrales de l’humanité: théologien, philosophe, prosateur, mystique… Augustin est au sommet de ce que l’humanité a produit de plus génial.

Je ne m’attarderai pas ici à dire en quoi Augustin pourrait être un archétype de 7, mais plutôt à voir en quoi il constitue un modèle d’évolution pour les 7 d’aujourd’hui. Ce n’est pas tant qu’il ait mené une vie dissolue. Elle le fut sans doute moins que ce qu’il en a dit: comme saint Paul, il manie bien la rhétorique et sait accentuer ses turpitudes pour mettre en valeur sa conversion (on a là un joli signe de son sous-type social que sa capacité à sacrifier son plaisir propre pour exercer sa charge d’évêque confirmera).

C’est plutôt cette quête insatiable de nouveauté, cette fuite de l’ennui, cette recherche permanente de nouveau, d’excitation intellectuelle, et cet évitement de la souffrance qui nous orientent vers le 7. Combien de fois a-t-il ouvert la Bible et l’a-t-il refermée car cela l’ennuyait? Tout cela, au service d’un centre mental préféré (et d’autant plus impressionnant que nous sommes en présence d’un génie) qui lui rend difficile l’accès à ses émotions. Jusqu’à ce que le cœur s’ouvre, enfin.

Ce qui est admirable dans le chemin d’Augustin, c’est que les mots de plaisir et de désir demeurent des notions clef du début à la fin. Mais Augustin est passé de l’excès de passion de la base 7, la gloutonnerie (intellectuelle au moins autant que charnelle) à la sobriété (vertu de la base 7); de la dispersion à l’unification. Non pas que le désir ait été éteint, que la passion du plaisir (qui constitue, comme toute passion neutre moralement, un moteur) ait été étouffée: Augustin ne sombre pas dans le défaut de passion du 7 qui serait l’austérité. Pour une personne de base 7, il est plus facile de s’abstenir de boire que de boire modérément. Or, son chemin n’est pas l’abstinence, mais la tempérance: en goûtant et partageant le plaisir plutôt que de l’engloutir. Jusqu’au bout, Augustin n’aimera rien tant que ces soirées d’été où l’on parle avec des amis autour d’un verre de vin que le soleil a rendu aromatique et généreux. Il le dira dans les Confessions (4.8) : « Causer et rire en commun, lire ensemble de bons livres, être ensemble plaisants et sérieux. » Mais son désir est purifié, réorienté vers le seul objet de désir qui puisse étancher sa soif : Dieu.

C’est ce que l’on trouve dans ce magnifique extrait tiré du Commentaire de l’Évangile de Jean, une conception renouvelée du plaisir: « Être attiré par le plaisir, qu’est-ce que c’est? Mets ta joie dans le Seigneur, il comblera les désirs de ton cœur. Il y a un certain plaisir du cœur, lorsqu’il trouve délicieux le pain céleste. Si le poète a pu dire : Chacun est attiré par son plaisir  — non pas la nécessité mais le plaisir, non pas l’obligation mais la délectation — à combien plus forte raison nous-mêmes devons-nous dire que l’homme est attiré vers le Christ : l’homme qui prend sa joie dans la vérité, sa joie dans la béatitude, sa joie dans la justice, sa joie dans la vie éternelle. Or, le Christ est tout cela. » Commentaire de l’Évangile de Jean

Tout cela est bien joli me direz-vous. Mais qu’est-ce qui fait que moi, pauvre 7 en 2020, je peux espérer atteindre cette liberté dans le plaisir, liberté que je recherche au plus profond de moi-même alors que je fais le mal que je ne voudrais pas et que je peux devenir esclave de mes plaisirs, jusqu’à l’idolâtrie? À mon sens, l’ennéagramme comme tel ne donne pas de réponse à la question: il donne juste une boussole qui permet à chacun de trouver son propre cap en fonction de ses finalités propres.

Celui que propose Augustin est le plus sûr, le plus passionnant, mais aussi le plus difficile pour une personne de base 7 connue pour son côté généraliste, son génie du zapping et, à son pire, pour sa superficialité: celui de la plongée en lui-même, celui de l’intériorité. Car à force de chercher, de chercher jusqu’à en pleurer de rage, un jour, son cœur s’est brisé et il s’est ouvert: c’est le bouleversant texte des Confessions au chapitre 27 :

« Tard je t’ai aimée, beauté si ancienne et si nouvelle, tard je t’ai aimée.
C’est que tu étais au-dedans de moi, et moi, j’étais en dehors de moi !
Et c’est là que je te cherchais ;
ma laideur se jetait sur tout ce que tu as fait de beau.
Tu étais avec moi et je n’étais pas avec toi.
Ce qui loin de toi me retenait, c’étaient ces choses qui ne seraient pas, si elles n’étaient pas en toi.
Tu m’as appelé, tu as crié, et tu es venu à bout de ma surdité ;
tu as étincelé, et ta splendeur a mis en fuite ma cécité ;
tu as répandu ton parfum, je l’ai respiré et je soupire après toi ;
je t’ai goûtée et j’ai faim et soif de toi ;
tu m’as touché, et je brûle du désir de ta paix. »

Au bout du chemin se trouve pour la personne de base l’objet de sa quête, ce pour quoi il est fait et son talent propre à mettre au service du monde : la joie. Mais cette joie ne repose plus sur le sable des plaisirs, souvent bons et légitimes, mais éphémères et qui portent dans leurs délices la promesse amère de leur inéluctable disparition. Cette joie repose sur le roc de Dieu, celui de sa parole, celui de son eucharistie, celui du cœur à cœur de l’oraison, celui du corps de l’Église. Alors cette joie peut être sans voile, parce qu’elle est aussi solide que la promesse de Dieu.

« Donc, mes frères, soyez joyeux dans le Seigneur, non selon le monde. C’est-à-dire : soyez joyeux dans la vérité, non dans l’iniquité ; soyez joyeux dans l’espérance de l’éternité, non dans l’éclat fragile de la vanité. C’est ainsi qu’il vous faut être joyeux: en tout lieu et en tout temps où vous serez ainsi, le Seigneur est proche, ne soyez inquiets de rien. » Sermon 171

Augustin, par son évolution, montre qu’au cœur de la personne de base 7, se trouve tapie une immense soif d’absolu (certains parlent d’une flèche cachée – mystique – entre le 7 et le 4) que la plupart du temps, il ne s’autorise pas à accueillir par peur de lâcher les plaisirs éphémères dont il a fait des remèdes illusoires contre la souffrance. Car au fond, il a peur de cette plongée en eaux profondes qui, inévitablement, va le faire traverser ces ténèbres qu’il fuit, parfois depuis la petite enfance. Mais c’est le chemin nécessaire, celui de la Samaritaine – autre archétype de base 7 évoquée par Monseigneur de Roo –  symbolisé par la profondeur du puits de Jacob, pour arriver à trouver au-dedans de lui Celui qui l’attend pour lui donner la joie qui ne passe pas.

* L’archétype est un représentant connu et supposé d’un type de l’ennéagramme, l’hypothèse reposant sur des éléments caractéristiques de sa vie ou de son œuvre.